samedi, mai 31, 2014

Shahram Nazeri : "Je suis un enfant kurde, je ne sais pas le persan" et "Kurdistan, si tu n'es pas…"

Je suis un enfant kurde, je ne sais pas le persan, 

je suis de Kermanshan et je ne sais pas le persan.



C'est pour avoir interprété cette chanson,lors d'un concert à Kermanshan (Kurdistan d'Iran), sa ville natale, que Shahram Nazeri fait  maintenant face à de rudes attaques de la part de media iraniens,  dans la veine islamo-nationaliste, et passe pour un  'séparatiste'. Raja News a ainsi dénoncé le caractère 'ethnique anti-persan' et 'honteux' de sa prestation.

Auparavant, cette chanson a été chantée avant lui par un autre chanteur kurde, de Sine, celui-ci, Naser Razazi, mais celui-ci l'a fait de Suède et maintenant du Kurdistan d'Irak, et cela n'a pas alarmé autant la presse des Pasdaran.






Cette fois, il s'agit d'un chanteur dont la célébrité dans tout l'Iran et l'envergure internationale vont bien au-delà du seul public kurde. De plus, comme si cela ne lui suffisait pas, décidément en verve patriotique sur le mode Ala rengîn, il a entonné, lors du même concert :



'Kurdistan, si tu n'es pas, que m'importe la couronne d'un roi ?'






Le plus drôle est que ce Kermanshahi, qui a enregistré de magnifiques albums kurde et goranî, comme Heyranî, ou le Shahanameh kordî (Avaz-e Asatir), est aussi un des plus grands interprètes de poésie persane, qui voue une dévotion à Rûmî (mais justement parce qu'il est kurde, dit-il). Il est donc plaisant de l'entendre chanter  'je ne sais pas le persan', lui qui est précisément un de ses maestros.

Mais même hors d'Iran et du Kurdistan, il y a toujours, parmi son public persan ou occidental, quelques Kurdes pour réclamer une chanson 'natale', ce à quoi il se prête volontiers, et avec un bon sourire, je puis en témoigner.

mercredi, mai 28, 2014

Jordi Tejel Gorgas : La question kurde : passé et présent

La question kurde : passé et présent



La question kurde émerge au début du XXe siècle comme une question "minoritaire" liée à l'apparition des Etats-nations modernes au Moyen-Orient. De par sa nature transfrontalière, elle ne peut pas être comprise dans sa complexité si l'on néglige les connexions intra-kurdes et la gestion régionale du conflit kurde par les Etats concernés. Cet ouvrage repose sur une grille de lecture à plusieurs niveaux, proposant des interprétations fines et parfois paradoxales.



jeudi, mai 22, 2014

Abrégé du Livre des Pays, d'al-Hamadhani, trad. Charles Pellat



Lecture complète en ligne sur le site de l'IFPO.

Éloge de l’éloignement du pays natal : pp 57-70


Il y a aussi l’affaire de Ğa’far le Kurde qui rendit périlleuses les routes : le calife le vainquit et le tua. 

La Ğazīra : pp 155-162

La cité de Mossoul fut bâtie par Muḥammad b. Marwān ; quant au Rāwand de Mossoul, il fut bâti par Rāwand b. Biyūrāsf. ‘Umar b. al-Ḫaṭṭāb nomma gouverneur de Mossoul ‘Utba b. Farqad as-Sulamī, l’an 20 ; les gens de la citadelle l’ayant combattu, il prit de vive force la citadelle orientale et passa le Tigre ; alors les gens de l’autre citadelle firent leur soumission moyennant capitation ou autorisation d’émigrer pour celui qui le voudrait. Ensuite, il conquit al-Marğ et sa banlieue, le territoire de Bānuhadrā, Dāsin et toutes les forteresses des Kurdes. 

Pays orientaux : pp 235-389


Les zumms47 des Kurdes dans le Fārs. — Au dire de l’auteur du Kitāb al-Masālik wa-l-mamālik, ‘Abd Allāh48 b. Muḥammad b. Ḫurradāḏbih, les Kurdes occupent, dans le Fārs, quatre zumms : particulièrement le zummd’al-Ḥusayn b. Ğīlawayh, nommé al-Bāzanğān, à 14 parasanges de Šīrāz ; le zumm d’Arğam b. Ḫawānğāh49, à 26 parasanges de Šīrāz ; le zummd’al-Qāsim [204] b. Šahriyār, nommé al-Kūriyān, à 50 parasanges de Šīrāz ; le zumm d’al-Ḥusayn b. Ṣāliḥ, nommé as-Sūrān, à 7 parasanges de Šīrāz.






Abbas Kamandi, 1952 - 2014, Sine.


mercredi, mai 21, 2014

Religious Minorities in Kurdistan : Beyond the Mainstream





Beyond the Mainstream, edited by Khanna Omarkhali, represents an account of the various religious milieus flourishing beyond the Islamic mainstream in all parts of Kurdistan. The miscellany describes how the religious minority groups operate within the Kurdish regions, which themselves have been subject to numerous conflicts and social as well as political transformations at the turn of the 21st century. This volume emphasizes recent developments affecting these communities, in particular their social and religious lives. Six chapters are dedicated to the Ahl-e Haqq (Yarisan/ Kaka’is), Yezidis, Alevis, the Haqqa and Khaksar Sufi traditions, the Shabaks, as well as to the Jewish and Christian communities in Kurdistan. The anthology includes three indices and a glossary of religious terms appearing in the volume.


Religious Minorities in Kurdistan: Beyond the Mainstream

Kurdish Studies vol. 2, nº 1 (2014)


Vol 2, No 1 (2014)Kurdish Studies, Volume 2, Issue 1, May 2014


Kurdish Studies journal is an interdisciplinary and peer-reviewed journal dedicated to publishing high quality research and scholarship. Kurdish Studies journal is initiated by the members of the Kurdish Studies Network (KSN) and supported by a large group of academics from different disciplines. The journal aligns itself with KSN's mission to revitalize and reorient research, scholarship and debates in the field of Kurdish Studies in a multidisciplinary fashion covering a wide range of topics including, but not limited to, economics, history, society, gender, minorities, politics, health, law, environment, language, media, culture, arts, and education.

Open access to the articles in this issue are sponsored by Ahmed Foundation for Kurdish Studies (USA).



mardi, mai 20, 2014

Nuit de la littérature avec Fawaz Hussein et La Prophétie d'Abouna



La Nuit de la littérature organisée par le Forum des Instituts Culturels Etrangers à Paris (FICEP) et à l'initiative du Centre tchèque de Paris aura lieu cette année dans le Marais, le samedi 24 mai 2014 de 17h à minuit.

 L’écrivain Fawaz Hussain lira des extraits de son dernier roman « La prophétie d’Abouna » dans les magnifiques locaux des Archives de France, 60 rue des Francs-Bourgeois, 75003 Paris. Manifestation de 17h à minuit.



Abouna («Notre père» en arabe) est le nom par lequel les prêtres chrétiens sont désignés en Orient. Il s'agit ici du directeur de l'école dans laquelle Mohamed, le jeune Kurde syrien, est éduqué et apprend le français. Prenant l'enfant sous son aile, Abouna l'incite à persévérer et forge ainsi la prophétie qui le guidera toute sa vie.

Septembre 1978. Mohamed débarque à Roissy, la tête remplie des romans de Balzac et d'un immense espoir : conquérir la capitale et ses lettres. Ainsi commence la saga tragi-comique de celui qui, désormais, se fera appeler «Momo», par discrétion et pour attirer plus aisément les filles. 
La prophétie d'Abouna est l'histoire de la découverte de Paris, de ses habitants et de leurs coutumes parfois étranges. Le Paris des étudiants étrangers vivant dans la capitale : vies rythmées par les études et les petits boulots, les espoirs et les craintes, les joies et les échecs, vies ignorées par les Parisiens eux-mêmes. 
C'est également le chemin sinueux menant des rives de la Seine aux neiges de la Laponie. 
C'est enfin la présence mystérieuse, tout au long du récit, de celui qui lui donne son nom : Abouna, toujours vêtu de la longue robe noire propre aux prêtres orientaux. Apparition parfois non attendue, rassurante et espérée, qui guidera « Momo » vers son destin d'écrivain. 
Récit sans fard des premières années parisiennes de Fawaz Hussain, récit de la découverte du lieu de tous les espoirs mais aussi des désillusions, La prophétie d Abouna reste empreinte de tout l'optimisme et de la naïveté de ce jeune kurde syrien, déjà francophone et pourtant encore si « rural ». 

Fawaz Hussain est un écrivain kurde de langue française. Né dans le nord-est de la Syrie, il vit à Paris et enseigne notre langue aux lycéens et aux étrangers. Il est l'auteur de plusieurs romans dont Prof dans une ZEP ordinaire, Le Rocher 2006 et Les sables de Mésopotamie, Le Rocher 2007. Fawaz Hussain traduit également en kurde les grands auteurs français (Camus. Saint-Exupéry...).

Soirée kurde avec Issa et Zîrek



Vendredi 23 mai à 19 h, sur la péniche Anako, projection du film Paris d'Exil et concert de Issa. Participation libre.


Bassin de la Villette face au 61, quai de la Seine 75019 PARIS Métro Riquet, Stalingrad ou Jaurès

vendredi, mai 16, 2014

Sîmav : Eau argentée - Syrie, autoportrait, festival de Cannes 2014



Sélection officielle, Séance Spéciale au festival de Cannes 2014.

EAU ARGENTÉE, SYRIE AUTOPORTRAIT



Réalisé par Ossama Mohammed et Wiam Simav Bedirxan.



 


SYNOPSIS 
En Syrie, les Youtubeurs filment et meurent tous les jours. Tandis que d’autres tuent et filment.A Paris, je ne peux que filmer le ciel et monter ces images youtube, guidé par cet amour indéfectible de la Syrie.  
De cette tension entre ma distance, mon pays et la révolution est née une rencontre.  
Une jeune cinéaste Kurde de Homs m’a « Tchaté » : « Si ta caméra était ici à Homs que filmerais-tu ? »  
Le film est l’histoire de ce partage.
Production : Les films d'Ici
Fiche technique :

Auteur : Ossama Mohammed & Wiam Simav Bedirxan

Image : Wiam Simav Bedirxan, thousand Syrians & Ossama Mohammed

Son : Raphael Girardot

Direction de production : Camille Laemlé & Martin Berthier

Montage : Maïsoun Assad

Musique Originale : Noma Omran

Mixage : Jean-Marc Schick

Producteur exécutif : Les Films d'Ici (Serge Lalou & Camille Laemlé) & PROACTION FILM (Orwa Nyrabia & Diana El Jeiroudi) en association avec Arte France- La Lucarne - Chargé de programme Luciano Rigolini

Version originale : Arabe

Version Disponible : VOSTVF - VOSTA

Durée : 90'

Format : HD 


CONTACTS ET LIENS UTILES

Production

PROACTION FILM - en cours 0000 Berlin GERMANY - T: +49 151 66488722 - orwa@proactionfilm.com

Presse française

MAKNA PRESSE - T: 01 42 77 00 16 - info@makna-presse.com - http://makna-presse.com

Presse internationale

MAKNA PRESSE - T: 01 42 77 00 16 - info@makna-presse.com - http://makna-presse.com

Ventes à l'étranger

DOC AND FILM - d.elstner@docandfilm.com

jeudi, mai 15, 2014

"Mise au pas", "vol d'Icare" et "montagne d'impunité" : trois ONG et deux Kurdistan

En ce printemps 2014 les rapports fleurissent sur le(s) Kurdistan(s) : deux pour le Rojava, un pour le Başûr :
D'abord, l’ONG Reporters sans Frontière publie un rapport en ligne sur leur site, intitulé :
où l’ONG se dit «  particulièrement inquiète de la nette dégradation de la situation de la liberté de l’information dans les territoires contrôlés par le Parti de l’Union démocratique (PYD). L’organisation est consciente des problèmes de sécurité dans cette région alors que le conflit s’enlise en Syrie et que les mouvements djihadistes menacent les populations civiles. Toutefois, en tant qu’autorité en charge de contrôler cette partie du territoire syrien, il est de la responsabilité du PYD d’y faire respecter les libertés fondamentales, parmi lesquelles la liberté d’information. »
Reporters sans Frontière estime notamment que l’ « Union des média libres » qui veut contrôler « les médias qui souhaitent travailler au Rojava […] ressemble à n’en pas douter à l’instauration d’une sorte de ministère de l’Information. Par ailleurs, l’organisation a recensé un nombre croissant d’exactions à l’encontre des acteurs syriens de l’information, principalement de la part des Asayesh (forces de sécurité) et les YPG (Unités de défense du peuple, ie, la branche armée du Comité suprême kurde, accusées d’être la branche armée du PYD). Déjà en novembre 2013, dans le rapport “Le journalisme en Syrie une mission impossible”, RSF avait déjà recensé un certain nombre d’exactions (pages 9 et 10 du rapport).

Se fondant sur des témoignages de journalistes kurdes venus couvrir les événements de Syrie pour des organes de presse comme Rudaw ou Zagros TV, RSF dénonce le fait que «  le PYD et ses sbires n’hésitent pas à arrêter, voire enlever, les acteurs de l’information un peu trop critiques, afin de les réduire eux au silence et intimider les autres. » Les journalistes ne seraient d’ailleurs pas les seules victimes de la politique coercitive du PYD, puisque « un certain nombre de cas de voix dissidentes de la société civile, [ont été] expulsées vers le Kurdistan irakien […] De nombreux acteurs de l’information ont ainsi pris la voie de l’exil, fuyant la pression et les menaces du PYD. »

Toujours au sujet du Rojava mais cette fois-ci explorant le champ du politique et de la stratégie militaire, un rapport de l'International Crisis Group doute de la viabilité du projet d'autonomie du PYD et du soutien réel des Kurdes de Syrie à ce parti ainsi qu'à ses milices, les YPG.





Middle East Report N°151 | 8 May 2014 

Traduction du résumé : (le rapport complet est à lire en ligne ou à télécharger ci-dessus)
Tandis que le régime syrien et l'opposition sont pris dans une guerre en dents de scie,  les forces kurdes ont renforcé leur contrôle sur de larges pans du nord du pays.  Les principaux acteurs, le Parti de l'union démocratique (Partiya Yekîtiya Demokrat, PYD) et sa branche armée, les Unités de protection du peuple (Yekîneyên Parastina Gel, YPG), ont assis à présent leur domination sur trois enclaves, étendues mais non contiguës de territoires à majorité kurde le long de la frontière turque, où le PYD a proclamé en novembre 2013 l'Administration provisoire du Rojava (Kurdistan occidental). Cette gouvernance kurde est sans précédent en Syrie comme pour le PYD, qui est un surgeon du mouvement insurrectionnel des Kurdes de Turquie, le PKK, de qui il reçoit un soutien idéologique, organisationnel et militaire. Reste à savoir s'il s'agit d'un premier pas vers la stabilité et l'aspiration kurde à une reconnaissance nationale, ou si ce n'est qu'un répit dans une guerre civile qui se concentre ailleurs. Le PYD ne peut  décider à lui seul du destin du nord de la Syrie mais il peut accroître ses chances en élargissant son soutien populaire et en coopérant avec d'autres forces locales. 
Car tous les succès du PYD sont en partie illusoires, moins imputables à ses propres exploits qu'à ses liens avec d'autres forces régionales, dont le plus important est sans doute son alliance de facto avec le régime, qui lui a cédé des territoires, auxquels il continue à apporter une aide matérielle. Ce parti tire aussi avantage du soutien du Parti des travailleurs du Kurdistan (Partiya Karkerên Kurdistan, PKK), interdit en tant qu'organisation terroriste par l'UE et les USA, et actif de longue date sur la frontière turque. Le PYD est, dans la pratique, une branche idéologique, organisationnelle et militaire de ce groupe de gauche, dont l'organisation faîtière est, en théorie, l'Union des communautés du Kurdistan (Koma Ciwakên Kurdistan, KCK). Il bénéficie idéologiquement du prestige d'Abdullah Öcalan, le leader de longue date du mouvement ; c'est avec le soutien du PKK que les YPG sont devenues la force militaire la plus puissante de la région, celle dont le succès à repousser les militants djihadistes est peut-être la raison plus importante au destin ascendant des Kurdes. 
Mais ironiquement, ces mêmes facteurs, cruciaux pour le PYD, sont aussi son talon d'Achille. D'abord, ce qu'il a hérité du PKK a grevé ce parti d'une culture rigide, autoritariste et d'un programme flou qui sont en décalage avec les attentes populaires. Sa gouvernance maladroite n'invite, au mieux, qu'à un assentiment contraint de la part    d'électeurs dont la jeune génération, en particulier, semble aspirer à quelque chose de différent. Les Kurdes syriens ont, depuis les années 1980, constitué un tiers des membres du PKK, dont les attentats et les meurtres de civils passés ont ostracisé l'insurrection dans les capitales occidentales ; une telle affiliation bloque tout effort pour obtenir une légitimation internationale. 
Deuxièmement le soupçon de collaboration avec le régime a plombé sa popularité. Les autorités de Damas, qui ont maintenu une présence discrète mais ferme dans les zones contrôlées par le PYD, auraient agi essentiellement de façon souterraine. Même s'ils ont abandonné le contrôle de certains biens publics (notamment les bâtiments administratifs et de sécurité) au PYD, ils ont maintenu leur emprise et continuent à distribuer les ressources d'État, sans lesquelles le projet du Rojava ne pourrait subsister. 

Troisièmement, la compétition pour le pouvoir du PYD avec ses prétendus alliés, parmi eux le plus important étant le Parti démocratique du Kurdistan de Massoud Barzani, le président d u Gouvernement régional du Kurdistan en Irak, a engendré un désenchantement et une 
fatigue dans la population et a laissé le champ libre aux puissances régionales – surtout la Turquie et l'Iran – pour manipuler les différentes parties en fonction de leurs propres intérêts. Barzani est en bons termes avec Ankara et Washington, de sorte que le PYD a peu d'alliés hormis Damas, l'Iran et, dans une certaine mesure, le gouvernement de Nouri Maliki à Bagdad.
Ces défis soulèvent des interrogations sur la profondeur et la viabilité du projet du Rojava. Pour les partisans du PYD, c'est le noyau d'une future autonomie kurde. Pour ses détracteurs, c'est une coquille vide, un instrument aux mains du régime. Il est difficile de discerner une issue pour le Rojava. Sa dépendance envers le régime lui aliène des électeurs, mais tout pas en direction des partenaires kurdes et des autres acteurs risque de compromettre sa domination sur le terrain en sapant ses relations avec Damas. 

Les droits des Kurdes – pour ne pas parler d'une stabilité locale à long terme – arne sont pas susceptibles d'être réalisés par le PYD qui a tourné le dos à ses alliés naturels pour un partenariat de circonstance avec un régime qui a dénié ces droits depuis longtemps. Ce dont ont besoin tous les peuples du nord de la Syrie, kurdes ou non kurdes, est une stratégie commune pour traiter à la fois avec Damas et avec les communautés 
minoritaires de la région.  
Il faudrait pour cela que le  PYD :
  réduise sa forte dépendance envers sa propre armée et celle du régime et élargissent à la place sa base de soutien parmi les populations kurdes et non kurdes, ainsi qu'auprès des 
membres les plus pragmatiques de l'opposition syrienne ;
  mettre au point, conjointement avec le soutien de sa base, une stratégie pour remplacer le régime en tant que pourvoyeur de services, et assurer à la région un accès aux ressources ;
  diversifier ses relations avec les puissances étrangères, afin de diminuer leur capacité à exploiter les tensions communautaires dans leur propre intérêt. 
Unir le nord de la Syrie n'est pas une mince affaire,  mais la récompense pourrait être proportionnelle à la difficulté de la mission : l'émancipation d'un régime qui est susceptible un jour de tourner brutalement son attention sur le nord du pays. 

  • Enfin le CPJ a publié ce mois-ci un rapport sur la « vulnérabilité » de la presse au Kurdistan d’Irak dès lors que ses journalistes abordent des sujets « sensibles » tels que la religion, les inégalités sociales et la corruption, surtout s’ils les mettent en lien avec des responsables politiques :

     Mountain of impunity looms over Kurdistan journalists


    Sont ainsi évoqués :
le meurtre de Kawa Garmiyani, rédacteur en chef du journal Rayel, dont les articles sur la corruption visaient plus particulièrement des membres de l’UPK. Menacé de mort en juillet 2012 par Mahmoud  Shangawi, un général d’armée membre de ce parti, il a été assassiné dix-huit mois plus tard, à Suleïmanieh, le 5 décembre 2013. Âgé de 32 ans, il laisse une veuve qui a accouché d’un fils posthume 17 jours après le meurtre. 
Arrêté en janvier 2014, Mahmoud Shangawi a clamé son innocence et a été relâché faute de preuves. Un autre membre de l’UPK a été ensuite arrêté et plaide coupable, mais la famille de la victime doute qu’il ait pu être le « cerveau » du meurtre. 
De journalistes et des militants des droits de l’homme ont organisé des manifestations dès le 20 décembre, en accusant ouvertement l’UPK de couvrir le meurtrier. Le rapport du CPJ, se fondant sur les témoignages du Groupe Metro Center, une ONG de défense des journalistes basée à Suleïmanieh, rappelle que ces dernières années, près de 700 agressions dirigées contre des journalistes ont été enregistrées, sous forme de menaces, de harcèlement, de coups, de détentions, d’intimidation et d’incendies criminels. La plupart de ces faits sont restés impunis. 
Le nombre de ces agressions a connu un pic au début de 201, lors des manifestations meurtrières à Suleïmanieh, contre la corruption et les abus de pouvoir des responsables locaux. Au cours de 2011, Metro Center a constaté 359 attaques contre des journalistes et des media, un nombre inégalé jusqu’ici. Ce chiffre a baissé en 2012 (132) et 2013 (193). La campagne électorale et les tensions nées des compétitions entre les partis a rehaussé cependant les agressions. 
Selon le gouvernement kurde, cette baisse des attaques est à mettre en parallèle avec une implantation plus profonde des valeurs démocratiques dans la société et une augmentation de la tolérance. Le ministre adjoint de l’Intérieur a ainsi expliqué au CPJ que son ministère avait invité des experts occidentaux dans le domaine des media à venir former des officiers de sécurité sur la façon de se comporter avec les journalistes et que la diversité des publications dans la Région kurde témoigne de sa volonté d’encourager la liberté de la presse. 
Le CPJ reconnaît que des centaines de publications paraissent sur papier ou sur Internet, en plus des autres media. Mais que les quotidiens sont dominé par les partis au pouvoir et publient souvent des entretiens avec des dirigeants, retranscrits tels quels avec des portraits photographiques flatteurs. Les journaux indépendants ne sont que des hebdomadaires ou des bi-hebdomadaires. Le journalisme télévisé dépendait aussi des grands partis, jusqu’à ce que ce monopole prenne fin en 2011, avec Nalia, la première chaîne de radio télévision privée.  
Les réseaux Internet sont par contre très actifs, avec de nombreux Websites et une grande vitalité des réseaux sociaux, comme Facebook ou Twitter, en raison de connexions Internet rapides et de qualité, et pourtant bon marché. La diffusion de l’information sur Internet est donc largement suivie par le public et les débats et les contestations qui ne trouvent pas leur place dans les media traditionnels se déroulent sur le Web. 
« Les journaux ne pourraient jamais jouer le rôle tenu par les réseaux sociaux », explique Hemin Lihony, rédacteur en chef de Rudaw (à la fois journal en ligne, sur papier et depuis peu télévisé), qui indique que 85% de l’audience de son journal vient via Facebook ou Twitter. « C’est en train de changer l’attitude des partis politiques à tout point de vue. Maintenant, avant de faire une déclaration, les politiciens devraient penser aux réactions que cela va engendrer dans les media sociaux. » 
S’il n’est pas impossible d’enquêter sur la corruption ou d’autres sujets sensibles, beaucoup de journalistes disent pratiquer une forme d’auto-censure, surtout lorsque leurs enquêtes visent des officiels, et ne s’expriment qu’en termes généraux, en désignant, par exemple, un organisme gouvernemental comme miné par la corruption, mais sans pouvoir mettre en cause directement son responsable, ce qui fait que les articles manquent souvent d’efficacité et restent dans le vague. 
Pour avoir manqué à ces mesures de prudence, et ce dans une des régions les plus tribales et rurales du Kurdistan, le Germiyan, Kawa Garmiyani n’avait pas hésité, dans son journal, Rayel, à mettre en cause nommément des responsables locaux, ce qui est qualifié de « ligne rouge » par Dana Assad, rédacteur du journal Awene, auquel Kawa Garmiyani collaborait aussi. 
L’article de loi 35/2007 interdit la détention, le harcèlement de journalistes et la fermeture de journaux ce qui en fait une juridiction extrêmement progressiste au vue des normes générales du Moyen-Orient concernant la liberté de la presse. Mais les restrictions apportées à cette liberté dans la constitution ont une nature vague dont l’imprécision donne une grande marge de manœuvre pour s’attaquer à une publication : « incitation à la haine », « insulte et offense aux croyances religieuses », « divulgation de la vie privée ». Beaucoup de journalistes ont été ainsi détenus (en violation de la loi) pour « espionnage » ou « déviation des normes sociales ». Ils sont souvent soumis à des amendes. 
En 2013, le Parlement kurde a voté une autre loi pour garantir l’accès du public à l’information, mais les journalistes estiment que le problème majeur n’est pas le contenu des lois mais leur respect, car selon eux, les tribunaux ne sont pas indépendants du pouvoir. 
Le CPJ recommande entre autre au GRK d’enquêter et de résoudre les meurtres, non seulement de Kawa Garmiyani, mais aussi de Serdesht Osman, autre journaliste, basé à  Erbil, et assassiné en 2010 ; de fournir une formation et de l'éducation au personnel judiciaires et des forces de l’ordre afin qu’aucun journaliste ne soit détenu illégalement, pour ses activités professionnelles ; d’amender les lois sur la presse de façon à ce que leur contenu soit plus précis et moins sujet à une interprétation abusive ou arbitraire. 
Le CPJ recommande aussi aux partis politiques d’encourager les débats ouverts et les critiques et de ne pas encourager les violences à l’égard de la presse, et à l’UNESCO, d’œuvrer pour l’application du Plan d'action des Nations Unies sur la sécurité des journalistes et la question de l'impunité, avec le Gouvernement régional du Kurdistan, afin de développer et à améliorer la législation et les mécanismes de protection des journalistes et de garantir la liberté d'expression et d'information.

mardi, mai 13, 2014

Les élections provinciales au Kurdistan d'Irak




En même temps que les élections législatives se déroulaient au Kurdistan comme dans tout l’Irak, les trois provinces kurdes élisaient leurs conseils provinciaux. 

En 2013, ces élections provinciales avaient eu lieu dans la plupart des gouvernorats irakiens, sauf la Région kurde, et les provinces de Kirkouk, Ninive et d’Anbar. Ces deux dernières provinces ont voté le 20 juin 2013. Quant à Kirkuk, l’article 23 de la loi électorale remettait la tenue, la date et le déroulé des élections entre les mains d’un « comité multi-ethnique » sous la règle d'un consensus général. Mais en août 2013, la cour fédérale de l’Irak a annulé cet article, arguant de l’inefficacité de ces dispositions (les élections ont été plusieurs fois reportées). À la place, la commission juridique du Conseil des représentants a rédigé une nouvelle loi électorale, se passant de l’assentiment de toutes les composantes ethniques, religieuses et politiques de la province pour la faire approuver. Cette décision de la cour fédérale avait surtout rencontré l’opposition des minorités arabes et turkmènes, craignant de perdre du poids politique face à la supériorité démographique des Kurdes. Jusqu’au bout, c’est-à-dire à la veille des élections du 28 avril (pour les forces de sécurité), des voix, même minoritaires, se sont élevées pour demander le report de ces élections. Ainsi Sheikh Abdulrahman Al Asai, à la tête du Conseil politique arabe, mais d’autres, comme le candidats de la liste Al Iraqiya, soutenait leur tenue, accusant le Premier ministre Maliki de soutenir en sous-main les contestataires.

Dans le reste de la Région kurde, ces élections et la campagne électorale qui a duré tout le mois d’avril ont plus d’impact dans l’opinion publique que les législatives irakiennes, comme l’ont remarqué les medias étrangers ou irakiens, d’autant que les conseils de province n’avaient pas connu d’élections depuis huit ans. 

« Même la campagne d’affichage placardé dans les rues kurdes montre cela – la plupart concerne les élections provinciales plus que les législatives irakiennes. C’est la même chose pour la couverture des media locaux des deux élections : les provinciales font l’objet de plus d’attention. » (Hayman Hassan, pour le journal Niqash).

À cela, plusieurs explications peuvent être avancées : un « désenchantement » ou un scepticisme des Kurdes sur l’influence réelle que leurs députés peuvent exercer sur la politique de Bagdad à leur égard, mais aussi un intérêt accru par la compétition entre les trois grands partis de la Région, toujours en tractations, depuis les législatives de septembre 2013, pour la formation d’un nouveau cabinet. Survenant à peine 8 mois après la défaite de l’UPK devant le parti Goran, ces élections étaient un moyen pour les factions politiques, soit de conforter leur victoire, en ce qui concerne Goran, soit de prendre leur revanche, en remontant de la 3ème à la 2ème place, pour l’UPK. Les partis religieux, Yekgirtu et Komal, qui avaient également fait un bon score, surtout à Suleïmanieh, pouvaient aussi espérer voir leurs résultats se maintenir ou s’améliorer.

Surtout, la loi électorale des conseils provinciaux a également changé au GRK. Auparavant, les gouverneurs de province étaient directement nommés par le ministre de l’Intérieur de la Région. Ce même gouverneur pouvait choisir et nommer de hauts fonctionnaires sans en référer aux conseils. Dorénavant, dans une volonté de décentralisation, ce seront les conseils provinciaux qui nommeront le gouverneur, accroissement de pouvoir qui, bien sûr, ont rehaussé l’intérêt de ces élections qui doivent décider du poids des partis au sein de ces conseils.

Contrairement au reste de l’Irak, le scrutin s’est déroulé dans le calme et sans attaque terroriste, même si, ça et là, surtout dans la province de Suleïmanieh, des accusations de fraude se sont élevées à l’encontre des partis dominants qui ont une certaine mainmise sur les forces de police et de sécurité.

Les premières estimations publiées sur Rudaw montrent que, par rapport aux élections de 2011, la participation a été moindre, malgré une augmentation du nombre des électeurs dans toute la Région de 216 211 électeurs, soit, dans chaque province :

  • Duhok : + 62 706
  • Erbil : + 60 636
  • Suleïmanieh : + 92 869


Sur ce total de 216 211, les électeurs du GRK étaient 80 784 de moins à voter (1 887.991 contre 1 968 775 en 2011), soit un taux de participation de 67% pour tout le GRK et dans chaque province.

  • Duhok : 69% (445 647 sur 641 436), 
  • Erbil : 61 % (643 280 sur 1 052 596), 
  • Suleïmanieh 71% ( 799 064 sur 1 125 000).



Résultats provisoires des élections provinciales 2014 (GRK + provinces) :


Si l’on compare avec les résultats des législatives de septembre 2013 :


On voit qu’en 2014, le PDK perd 16 612 voix  mais que son pourcentage des votes au total augmente de 1%. Il gagne 11 184 votes à Duhok (+2%), en perd 17 428 à Erbil (-2%) et 10 368 à Suleïmanieh (-2%).

Gorran perd 12 875 voix et son pourcentage du total des votes augmente de 1%. Il gagne 12 445 voix à Duhok (+3%), en perd 35 369 à Erbil (-3%), gagne 10 039 voix à Suleïmanieh (+2%).

L’UPK gagne 82 984 voix par rapport à 2013 et augmente son pourcentage du total des voix de 5%. Il gagne 12 106 voix à Duhok (+5%), 49 630 voix à Erbil (+4%) et 21 248 voix à Suleïmanieh (+ 3%).

Total des voix perdues/gagnées et pourcentage des votes :



Ainsi, l’on peut voir que le PDK gagne des voix à Duhok, son fief, mais en perd à Erbil et Suleïmanieh. Gorran progresse aussi à Duhok et à Suleïmanieh, mais recule à Erbil. L’UPK est le parti qui a gagné des voix dans les trois provinces, tandis qu’à l’inverse, Yekgirtu en perd partout. Komal perd des voix à Duhok et Suleïmanieh, en gagne à Erbil.

Le fait le plus notable a donc été la remontée surprise de l’Union patriotique du Kurdistan. On observe aussi un amenuisement ou une stagnation des votes pour les deux  partis religieux Yekigirtu et Komal. 

A priori, et sous réserve des résultats définitifs, ni Gorran ni Komal n’obtiendrait de siège dans les conseils provinciaux.

La dernière élection des conseils provinciaux remonte à 2011, remportée par l’actuel gouverneur (vainqueur aussi aux législatives de 2010) devant Gorran, mais à l’époque, l’UPK et le PDK faisait encore liste commune dans l’Alliance kurde. 


lundi, mai 12, 2014

Hoshyar Zebari sera-t-il le prochain président irakien ?

30 avril 2014 ;
(source : sa page facebook)

Alors que la campagne électorale pour les législatives et les provinciales irakiennes battait son plein, la question du budget coupé par Nouri Maliki, le Premier ministre irakien, à la Région du Kurdistan n’a toujours pas été résolue. Dans une interview donnée au journal arabe Al-Hayat, Massoud Barzani estimait que l’Irak était en train de se décomposer et qu’il fallait faire avec cette réalité politique : « une instabilité majeure », un « terrorisme rampant dans les régions occidentales du pays » (à majorité sunnite et dans lesquelles EIIL tente de s’implanter durablement) où « des villes échappent au contrôle du gouvernement et où des terroristes se livrent à leur action sous une forme publique ».

Selon lui, le cœur du conflit entre Bagdad et Erbil tient à la différence d’interprétation de la constitution irakienne : « M. Maliki pense qu’il est le seul décisionnaire et que les autres doivent obéir. Il n’adhère pas à la constitution telle que la définit la Région du Kurdistan […] il croit que tout doit revenir à Bagdad. »

Quant aux provinces sunnites en état de quasi-insurrection, le président Barzani indique que juste après la chute de Saddam, il avait tenté de persuader les Arabes sunnites de former leur propre région, à l’instar des Kurdes, car il prévoyait déjà un conflit sanglant avec les chiites : « C’était possible à l’époque. Mais ils ont refusé et étaient encore dans l’idée qu’en Irak le pouvoir revient traditionnellement et historiquement aux sunnites. Ils n’ont pas saisi l’ampleur du changement qui advenait. Maintenant ils le réclament [de former leur Région] mais cela semble plus difficile et plus complexe à mener à terme. Ils le réclament et Bagdad le refuse. »

Les élections irakiennes ont commencé le 28 avril, quand les forces de sécurité ont voté, deux jours avant le 30, date du scrutin pour l’ensemble des citoyens. Dès le 28, des attentats ont frappé six bureaux de vote, faisant au moins 27 morts. EIIL avait déjà annoncé que tous les sunnites irakiens feraient l’objet de représailles s’ils se déplaçaient pour voter.

Du côté chiite,des attentats visant des meetings électoraux ont fait 37 morts et de nombreux blessés, certains dans un état critique.

Le 30 avril, donc, environ 60% des Irakiens, sur quelques 18 millions d’électeurs, se déplaçaient dans les bureaux en bravant le terrorisme, selon un taux de participation estimé par la Haute Commission électorale irakienne. 

Ces élections législatives doivent renouveler les 328 parlementaires du « Conseil des représentants », pour une durée de 4 ans. Le renouvellement du Parlement a aussi une incidence sur le gouvernement, puisque le Conseil des représentants doit élire le président irakien lequel, à son tour, nomme son Premier ministre.

Le mode de scrutin adopté est la représentation proportionnelle à scrutin de liste ouverte. Les dix-huit circonscriptions (gouvernorats) doivent élire leurs représentants, dont le nombre varie de 7 à 34, selon la démographie des circonscriptions. C’est la première fois que ce système est adopté en Irak, après décision de la Cour suprême. Auparavant, c’est la méthode Saint-Laguë modifiée qui était utilisée, qui donne un quotient à chaque siège, en favorisant les grands partis et c’est justement le motif qu’a invoqué la Cour suprême,  « discrimination envers les petits partis » pour ce changement de mode de scrutin. C’est ainsi que « sept sièges compensatoires » ont été attribué à des partis dont les résultats au niveau national ne se reflétaient pas dans chacune des circonscriptions. Enfin, huit sièges sont réservés à des minorités religieuses :  cinq pour les chrétiens, un pour les mandéens, un pour les yézidis, un pour les shabaks.

La Haute Commission électorale indépendante de l’Irak avait autorisé 276 entités politiques à se porter candidates. Ces entités ont formé des listes de coalition, dont la gagnante a, a priori et selon la constitution, une tête de liste qui a vocation à devenir le Premier ministre. Cela n’empêche pas les partis de former de nouvelles coalitions après les résultats électoraux.

Les partis politiques les plus importants en lice sont l’État de droit avec pour premier candidat l’actuel Premier ministre Nouri Maliki, le Mouvement sadriste (milices chiites), le Parti démocratique du Kurdistan de Massoud Barzani qui, cette fois, ne formait pas de liste commune avec l’Union patriotique du Kurdistan de Jalal Talabani, ni même avec Goran (parti d’opposition avec qui il est pourtant en tractation pour la formation d’un cabinet dans la Région du Kurdistan), l’Entente nationale irakienne, de l’ancien Premier ministre Iyad Allawi, un parti laïque pro-arabe, qui comprend des chiites comme des sunnites.

De nouveaux partis se sont formés depuis les législatives de 2010, notamment la « Ligue des gens de la Vérité », regroupant des milices chiites para-militaires proches de l’Iran et le Bloc blanc, qui résulte d’une scission du Mouvement national irakien, quand huit de ses parlementaires ont quitté ce dernier, en mars 2011, pour former leur propre groupe, en raison de désaccords avec Iyad Allawi. Pour les élections provinciales de 2013, ils avaient rallié la liste menée par Nouri Maliki et pour ces législatives, se sont présentés seuls.

En raison des tensions politiques et sectaires de plus en plus grandissantes en Irak, tout le monde s’attendait à un vote plus « communautaire » qu’inspiré par le programme politique (souvent assez succinct) de la plupart des listes. En dehors du Mouvement sadriste, les votes « religieux » chiites pouvaient se porter sur le Conseil islamique suprême de l’Irak, parti religieux chiite très influent dans le sud du pays mais qui a perdu du terrain, au niveau national, au profit de l’État de droit de Nouri Maliki. Ce parti prône une forme d’autonomie du sud chiite, mais à caractère assez théocratique.

En dehors du Mouvement national irakien, les votes sunnites pouvaient choisir entre Al-Hadba, mouvement nationaliste, bien implanté à Ninive-Mossoul (il s’y est souvent affronté avec les élus kurdes dans les conseils provinciaux) mené par Atheel Al Nujayfi, le frère d’Usama Al Nujayfi, l’actuel président du Conseil des représentants et le Front national irakien du dialogue, une coalition de cinq partis, quatre majoritairement arabes sunnites et un parti chrétien.

Les résultats ne seront connus que le 25 mai mais les estimations donnent la coalition menée par Nouri Maliki, État de droit comme venant en tête, avec une variable allant de 67 à 92 sièges remportés ; viendrait ensuite le Conseil suprême, la principale liste religieuse chiite, avec 39-48 sièges ; le parti sadriste aurait autour de 32-33 sièges. 

Du côté des sunnites ou laïques arabes, Al-Hadba, menée par Atheel Al Nujayfi obtiendrait entre 33 et 37 sièges ; à l’Entente nationale irakienne, fondée par l’ancien Premier ministre irakien, le sunnite Iyad Allawi, reviendraient entre 17 et 25 sièges, le Front national irakien du dialogue pourrait avoir 10 sièges.

Les Kurdes remporteraient 20 à 30 sièges pour le Parti démocratique du Kurdistan de Massoud Barzani, 14-15 avec l’Union patriotique du Kurdistan de Jalal Talabani et 10 pour Goran. 

L’Alliance démocratique civile, une coalition de plusieurs partis tels le Parti communiste irakien, le Parti national démocratique (sociaux-démocrates) ou le Mouvement socialiste arabe, obtiendrait 10 sièges, à égalité avec le Front national irakien du dialogue ; le Mouvement de réforme nationale de l’ancien Premier ministre irakien Jaffari, un parti religieux chiite, aurait entre 5 et 10 sièges.

Le Parti islamique de la vertu (une branche du mouvement sadriste) remporterait 7 ou 5 sièges, et le reste se disperse entre 52 partis mineurs (276 entités politiques avaient été approuvées par la Haute Commission électorale irakienne).

Si l’on peut d’ores et déjà donner la Coalition de Nouri Maliki comme gagnante, elle ne pourra probablement pas remporter la majorité absolue et devra négocier avec d’autres blocs parlementaires ce qui, étant donné la dégradation sécuritaire et politique du pays, donnera sans doute lieu à de houleuses et peut-être longues tractations. 

En plus des négociations entre groupes parlementaires, se profile déjà la succession du président de l’Irak, Jalal Talabani. Les Kurdes exigent, de façon assez peu « constitutionnelle » que la présidence leur revienne de droit, afin d’équilibrer un gouvernement irakien qui se partagerait entre Arabes chiites et sunnites. Candidats possibles : Massoud Barzani, l’actuel président de la Région du Kurdistan, qui a déjà signifié, via le porte-parole de son parti qu’il mettrait des « conditions » en acceptant cette fonction (principalement celles portant sur un accroissement des pouvoirs présidentielles) mais qui a finalement préféré mettre en avant la candidature de son oncle Hoshyar Zebari, l’actuel ministre des affaires étrangères irakiens, qui serait un choix plus consensuel que Massoud Barzani (dont les relations, d’abord « amicales » avec Maliki ont tourné au vinaigre depuis quelques années). 


Hoshyar Zebari a la capacité de représenter un « consensus » à la fois entre Kurdes et Arabes, mais aussi entre les différents partis kurdes, car ce haut responsable du PDK a, durant toute la période de la guerre civile PDK-UPK, qui a éclaté en 1994, servi de négociateur et de diplomate, jusqu’aux accords de 1998. C’est aussi un homme politique « irakien » (au contraire de Massoud Barzani, dont le terrain est resté purement kurde), exerçant de hautes fonctions au sein de l’opposition irakienne en exil du temps de Saddam, et finalement devenant un ministre des Affaires étrangères indéboulonnable depuis 2003, au temps du Conseil intérimaire, puis sous les gouvernement successifs d’Allawi, de Jaffari, de Maliki. 

Il est certain que Massoud Barzani ne serait jamais parti à Bagdad pour reprendre ce rôle de temporisateur, mais plus probablement pour y défendre les prérogatives de sa Région contre le gouvernement central. C'est en tout cas ainsi qu'il serait forcément vu par le reste de l'Irak. Le choix de Hoshyar Zebari permet aux Kurdes de garder un pied politique en Irak sans que celui qui apparait souvent comme le chef de file des aspirations à l'indépendance kurde ne se perde dans les sables stériles des conflits internes du sud.

Du côté des Irakiens, même si l'origine kurde du président irakien n'est pas inscrite dans la Constitution, cet accord tacite a toujours eu du poids, qui donnait aux Kurdes un poste leur permettant d'exercer une action modératrice et diplomatique (même si les pouvoirs présidentiels sont limités) entre chiites et sunnites, d'autant que ces derniers préféreront toujours voir nommer à un Kurde qu'un autre Arabe issu d'une faction rivale, politique ou confessionnelle. Le rôle et la stature de Jalal Talabani n'ont jamais été contestés à Bagdad, surtout au temps de la guerre civile. 

À l'heure où les conflits sectaires commencent à nouveau d'embraser l'Irak, en plus des querelles avec le Kurdistan, un président kurde bien implanté dans les milieux politiques irakiens a de très bonnes chances d'être approuvé par le nouveau Conseil des représentants. 

Musique de l'époque qajare, ensemble Delgosha



Vient de sortir, INEDIT, 2014, Maison des cultures du monde : Musique de l'époque qajare

Par l'ensemble Delgosha :

Siamak Jahangiry, flûte ney, direction
Pantea Alvandipour, chant
Elmira Mardaneh, viole kamancheh
Hamid Khansari, luth à manche court ud
Ariya Piratâi, luth à manche long târ
Vahid Fataei, tambour calice tombak

La Perse fut un creuset majeur du maqâm, cet univers musical savant dont l’influence s’est étendue le long des Routes de la Soie jusqu’aux confins de la Chine et de l’Inde. Mais c’est au milieu du XIXe siècle, sous le règne des Qajars, que l’art musical persan connaît son apogée. Le radif, c’est-à-dire le répertoire savant, est entièrement repensé et réorganisé, sans rompre cependant avec la tradition. Il s’enrichit de formes nouvelles comme le prélude pishdaramad ou l’intermède chaharmezrab et le chant prend une importance qu’il n’avait pas auparavant, concourant à un regain de la poésie. Jusqu’alors, les musiciennes étaient cantonnées à l’espace féminin. Elles commencent à paraître en public. La plus remarquable est Qamar ol-Molouk Vaziri, que ce soit par l’étendue de son registre, la rapidité et la souplesse de son vibrato, la délicatesse des ornements. 80 ans plus tard, Pantea Alvandipour fait revivre ce style vocal inimitable avec ses étonnantes brisures de la voix qui magnifient l’expression dramatique du chant. Elle est accompagnée par l’ensemble Delgosha, un petit ensemble instrumental dirigé par Siamak Jahangiry, un jeune maître de la flûte ney qui incarne la relève de la tradition musicale persane et auquel on doit les arrangements des deux suites de cet album : Avaz Afshari et Avaz Dashti, composées de préludes, de pièces vocales libres ou rythmées, d'interludes et d'improvisations instrumentales.
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Concert de soutien à l'Institut kurde