vendredi, juillet 27, 2012

Pınar Selek de nouveau jugée le 1er août


Communiqué du GIT
Pınar Selek sera encore déférée devant la justice le 1er août 2012, en pleines vacances lorsqu’ Istanbul sera désertée. C’est la poursuite d’un acharnement judiciaire qui dure depuis 14 ans. Alors que son affaire est déjà achevée, et clairement terminée depuis longtemps. Elle a été accusée il y a 14 ans, d’avoir posé une « bombe » dans le Marché aux épices d’Istanbul. En réalité, elle a été visée pour ses activités de sociologue travaillant sur les militants du PKK, parce qu’elle était une opposante défendant tous les laissés-pour-compte de la société turque : les Kurdes, les enfants de rue, les femmes, les homosexuels, les transgenres, et tant d’autres. L’affaire est terminée parce que Pınar Selek avait été accusée sur la base d'un témoignage d’une tierce personne obtenu sous la torture. Le témoin s’est rétracté par la suite. Elle est terminée aussi parce que plusieurs expertises ont démontré qu’il n’y avait pas l’ombre d’une bombe ce jour là au Marché aux épices et que l’explosion provenait en réalité d’une bonbonne de gaz. L’affaire est terminée parce qu’enfin aucune preuve n’atteste de la présence de Pinar au marché aux épices ce jour-là. D’ailleurs, l’affaire aurait dû être terminée depuis longtemps puisqu’à trois reprises le tribunal l’a acquittée. Et à trois reprises aussi, le procureur de la Cour de cassation a fait appel du premier jugement. Entre temps Pınar Selek a été emprisonnée, torturée, sa famille harcelée. Son procès est la manifestation d’un acharnement extrême pour faire taire une opposante, militante des droits humains, une scientifique qui a révolutionné la sociologie des marges en Turquie, qui s’est engagée sans jamais perdre de vue sa neutralité axiologique. Mais Pınar Selek n’est pas neutre, elle refuse de l’être. Tel Jean-Paul Sartre en son temps, elle a toujours considéré qu'il est du devoir de l’intellectuel de prendre part à l'histoire qui s’écrit. C’est ainsi que l’affaire Pınar Selek doit s’écrire désormais avec un A majuscule, renvoyant à une autre Affaire, française celle-ci, de conspiration d’Etat, l’affaire Dreyfus qui a reposé sur de faux témoignages, des preuves manipulées, des campagnes de presse, des juges dominés. Son nouveau procès est celui de la liberté de pensée, d’expression, de recherche, d’association, en somme, celui de la démocratisation de la Turquie. En ce sens, il dépasse largement la personne de Pınar Selek, qui, elle, est condamnée à vivre en exil car constamment menacée d’arrestation, d’emprisonnement, de torture. Loin de chez elle, mais comme elle le dit, jusqu’où ?[1] Nous appelons l’opinion publique française, turque, européenne, mondiale, à se tenir droit aux côtés de Pınar Selek pour cette nouvelle épreuve où se joue encore une fois le sort des libertés en Turquie.

jeudi, juillet 19, 2012

Molla Sadra et la réalité modulée

Vendredi 20 juillet à 15 h 00 : Molla Sadra et la réalité modulée. Évocation du philosophe iranien (1571-72/1640-41), Avec Cécile Bonmariage, auteure de Le Réel et les réalités, Mullâ Sadrâ Shîrâzî et la structure de la réalité (Vrin, 2008). Cultures d'Islam, A. Meddeb.






Présentation de l'éditeurLa philosophie de Sadr al-Pin Shirazi (Mullâ Sadrâ, m. 1640) est une brillante tentative de penser le réel comme participation de tout ce qui est à une seule réalité, l'être comme acte. Cet ouvrage clarifie la façon dont est conçue cette participation. Il situe l'explication du réel défendue par Sadrà face aux courants sur fond desquels elle se construit, les courants akbari et ishrâqi bien sûr, mais aussi la philosophie d'Avicenne telle qu'elle est interprétée par Nasir al-Pin 'Psi. Il dégage les principes fondamentaux de la métaphysique sadrienne : la fondamentalité de l'être et l'affirmation de son caractère modulé, et analyse comment ceux-ci sont mis en œuvre dans l'explication des rapports entre le Principe premier - le Réel par excellence - et les multiples existences particulières, interrogeant par là la spécificité et la cohérence interne d'un discours parcouru par des exigences parfois difficilement conciliables. Au terme de ce parcours apparaît plus clairement le cœur même de la pensée de Mullà Sadrâ : un intérêt marqué pour les existences particulières et un souci de leur conserver une consistance ontologique, une volonté de penser le Réel certes, mais aussi les réalités. Un choix de textes extraits des al-Shawnhid al-Rububivya et des Asfar al-arba'a, traduits pour la première fois en langue française, constitue la deuxième partie de cet ouvrage. 
Biographie de l'auteurCécile Bonmariage est Docteur en philosophie (Université catholique de Louvain). Après avoir été Chargée de recherches au Fonds National de la Recherche Scientifique de Belgique, elle est actuellement Research scholar à l'université de Princeton.

La torture, la Syrie et nous

Vendredi 20 juillet à 10 h 00 sur France Culture : La torture, la Syrie et nous. Avec Serge Portelli, magistrat et Michel Morzière (association Revivre en Syrie). Les Nouveaux Chemins de la Connaissance, Philippe Petit.

mardi, juillet 17, 2012

Discours donné par le président Barzanî au Consulat de France le 14 Juillet









Je salue toute l'assistance,

J'adresse au nom du peuple du Kurdistan et en mon nom les félicitations les plus chaleureuses au peuple français, au président de la France et à son représentant au Kurdistan, pour ce jour de 14 juillet qui célèbre la Révolution française.

La Révolution française a été aussi un modèle pour les autres peuples et, je ne sais par quel hasard, le 14 juillet est un jour célébré à la fois par les Irakiens et les Français, puisqu'en 1958, comme aujourd'hui, on célèbre aussi la révolution en Irak. Nous voyons ce qu'est devenue la nation française et malheureusement dans quel processus est tombé l'Irak.


Nous nous efforçons, en Irak, de vous imiter, cependant tout l'Irak n'accepte pas de s'engager sur le chemin qu'a pris la Région du Kurdistan, ce chemin que vous avez déjà parcouru. Nous ne renonçons pas à la démocratie et nous avons continuellement en vue le projet de la démocratie

L'histoire du peuple du Kurdistan et du peuple français est une belle histoire, avec toutes ces forces politiques qui en France, avec des points de vue différents, mais amicaux, ont considéré la cause du Kurdistan et à tout moment nous ont témoigné leur sympathie. En 1967, les accords de l'Irak avec la France avaient été signés pour l'achat de deux Mirage, au temps du général De Gaulle, si célèbre pour son immense héroïsme dans la France et dans le monde. 


À cette époque, l'ami des Kurdes qui travaillait au Kurdistan pour un journal, ce journaliste, Réné Mauriès, envoya une lettre de Son Excellence le général Barzanî au général De Gaulle disant : "Je sais et je comprends que la France a se propres intérêts, mais avant tout je voudrais de Votre Excellence avoir l'assurance que ces avions ne soient pas utilisés pour tuer les femmes et les enfants kurdes et brûler les campagnes du Kurdistan. Je demande seulement que ces informations soient envoyées à Votre Excellence." Mauriès apporta la lettre et après l'avoir lue le général De Gaulle résilia le contrat et aucune de ces armes ne fut vendue à l'Irak.

Je n'oublierai jamais non plus la si regrettée Danielle Mitterrand. C'est en 1989 que, pour la première fois, me parvint son engagement pour la cause, les malheurs, les souffrances et l'amertume du peuple kurde et pour les réfugiés qui, à l'époque, étaient en Turquie et pour ce peuple qui avait subi l'Anfal et les bombardements chimiques. Pour la première fois, en Europe, les Kurdes sentirent qu'il y avait quelqu'un de compatissant et de parole, avec des sentiments de haute valeur et un soutien, qui informa et fit prendre conscience des douleurs et des malheurs de ce peuple.

Lors du soulèvement de 1991 cette fois encore le Kurdistan fut plongé dans l'affliction, et le fut encore quelques autres fois et une relation/lien amicale avec ma mère se noua. Et ne s'effacera jamais de mes souvenirs pour la première fois où, en 1992, j'ai vu Son Excellence François Mitterrand, qui au moment où je me levais, a dit : Au peuple du Kurdistan, dites qu'ils ont un ami en France, qui est François Mitterrand et tant que je serai à cette place, je vous soutiendrai avec la nation française."

 En 2010 il y eut un nouveau président pour la France, qui m'a reçu chaleureusement et qui avant cela était une relation amicale et qui se montra un très bon ami du peuple kurde. Avec le docteur Bernard Kouchner, ministre des Affaires étrangères de l'époque en France, qui est un ami personnel très proche et un ami du peuple du Kurdistan, nous avons organisé une rencontre importante et nous avons signé un très bon accord sur lequel se sont fondées les relations économiques entre la Région du Kurdistan et la France et sur lequel se fondent principalement les relations économiques à l'avenir.

Je souhaite maintenant bonne chance au nouveau président français qui est un ami très proche des Kurdes et de moi-même, et que j'ai vu plusieurs fois. D'ici, je veux lui dire que nous avons un lien avec le peuple et nos amis de France, et j'ai grand espoir qu'avec lui, nos relations communes se renforceront jour après jour. 

 Enfin, celui qui importe le plus à mes yeux,  notre cher ami, le docteur Tissot qui a donné, durant 5 ans et avant cela, il y a 30 ans, toutes ses forces et son aide au Kurdistan. Il nous est très pénible de le voir partir, et nous savons que la nature de son travail diplomatique et ces 5 années ne furent pas simples, mais c'est un ami proche et cher et pour nous des plus respectés. C'est ainsi que nous nous lui donnons avec honneur le nom et l'insigne de peşmerga, nous le déclarons Peşmerga du Kurdistan.

Une fois encore je vous adresse mes félicitations et mes vœux de réussite et vous remercie.

Les Kurdes dans l'armée des Zankides

Les Zankides sont donc,

"en général considérés comme les souverains qui firent le plus appel aux Kurdes. Il faut dire que Zankî, dont on a dit qu'il fit un recours presque constant aux Turcomans qu'il avait combattus avec succès en Djéziré, usa d'une méthode analogue vis-à-vis des tribus kurdes du Diyâr Bakr. Il envahit leurs territoires, s'y empara de diverses places fortes, châtia les Humaydiyya (al-Akrâd al-humaydiyya) qui avaient soutenu le calife al-Mustarşid lorsqu'il avait assiégé Mossoul. Il légua même son laqab ('Imâd al-dîn) au château de Djalab, rebaptisé al-'Îmâdiyya. Humaydiyya, Başnawiyya et sans doute les Bakhtiyya ou Bukhtiyya, clans qui occupaient la région de Şahrazûr : une fois soumises, toutes ces tribus se transformèrent en soutien plus ou moins fiable, comme le montre la répétition des campagnes. Celle des Hakkârî, particulièrement, fut l'objet de tous ses soins. Enfin docile après une nouvelle expédition en 1142-3, elle livra son lot de combattants à l'armée zankide, dont des umarâ' de haut rang. Pas seulement des combattants, d'ailleurs. En effet, les Kurdes ne se cantonnaient pas strictement au domaine militaire. Plusieurs religieux renommés sortirent également de leurs rangs. 
Mais sans, il est vrai, toucher d'aussi près au pouvoir, les soldats kurdes avaient été incorporés aux armées musulmanes de Syrie bien avant Zankî. Déjà, l'armée à la tête de laquelle Atsiz était allé se faire pitoyablement battre en Égypte, en 1076, comprenait des Turcomans, des Arabes et des Kurdes. Celle dirigée par Mawdûd assiégeant Tall Bâşîr, en 1111, tout aussi hétéroclite, comprenait un fort contingent de Kurdes, sous la direction de l'émir Ahmadîl, peu ménagé par Ibn al-Qalânisî qui rapporte surtout son ambition effrénée : il ne pensait qu'à s'emparer des terres de Sukmân al-Qutbî (ou al-Qutubî) alors très malade. Comme son état empirait, Ahmadîl, pressé de s'en aller, prêta une oreille attentive aux propositions de Josselin, seigneur de Tall Bâşîr, qui réussit à le gagner et donc à sauver sa place :
"Alors Josselin, seigneur de Tall Bâşîr, envoya un message à l'émir kurde Ahmadîl ; il essayait de l'amadouer avec de l'argent et des cadeaux et lui promettait d'être avec lui et d'embrasser sa cause. La plus grande partie des troupes ('askar) était sous son commandement ; c'est pourquoi Josselin lui demandait bien humblement de s'éloigner de la forteresse. Il y consentit malgré le sentiment contraire des autres émirs ; la maladie de Sukmân al-Qutbî empirait et Ahmadîl avait décidé de partir, tant il désirait que le sultan lui donnât en iqta' le territoire de Sukmân avec qui il avait des attaches familiales.
Sous les Bourides, quelques Kurdes jouèrent un rôle particulièrement influent, tels 'Alî Kurd, Mudjâhid al-dîn Buzân b. Mâmîn al-Kurdî, "commandant des Kurdes", muqqadam al-Akrâd, constructeur de deux madrasas, maître de Sarkhad qu'il reçut contre rétribution, en 542/1147 ; ou Badrân al-Kurdî, personnage malfaisant, aux dires d'Ibn al-Qalânisî, qui, profitant des déficiences mentales de Şams al-mulûk, en devint l'homme de confiance.
Certains personnages kurdes eurent des carrières d'exception. Ainsi Asad al-dîn Şirkûh et son frère Nadjm al-dîn Ayyûb, membre des Rawâdiyya, qui servirent Zankî puis son fils Nûr al-dîn avant d'aller fonder la dynastie qui allait mettre fin à celle des Zankides. À suivre leur carrière, on en vient forcément à se demander si le poids des Kurdes, dans l'armée zankide, ne s'accrut pas parallèlement à leur montée en puissance. Quelle que soit la réponse apportée à cette question, elle ne peut être qu'incomplète : aucune source n'entre dans les détails. En revanche, il paraît certain que les soldats kurdes ne durent aucunement leur fortune à Şîrkûh, Nadjm al-dîn et leurs descendants. Leurs qualités de combattants étaient depuis longtemps largement reconnues. Qu'ils aient eu un poids certain dans l'armée de Nûr al-dîn, et pourquoi pas dans le 'askar personnel de Şîrkûh, les Asadiyya, ne fait aucun doute. Mais guère plus ne peut être dit. Lors de la bataille d'al-Bâbayn (25 djumâdâ I 562/ 18 mars 1167), le général kurde divisa ses hommes en aile droite, centre et aile gauche, conformément à la tradition. Lui demeura au centre :
"Le chef des Francs était le roi Amaury, ainsi qu'Ibn Nîrzân […]. Şâwar mit ses armées ('askar) en ordre. Il plaça les Francs à droite, avec Ibn Nîrzân, et l'armée égyptienne à gauche. Le roi Amaury le Franc se maintint au centre, à la tête de son armée franque. Asad al-dîn organisa son armée, plaçant Saladin à droite, les Kurdes à gauche, lui-même restant au centre."
Les Kurdes auraient occupé l'ensemble d'une aile. Mais cette information est trop isolée pour en conclure que les Kurdes formaient une part substantielle de l'armée de Şîrkûh (il s'agit de sa deuxième campagne égyptienne). De même, la solidarité ethnique évoquée par Ibn al-Athîr dans les pages qu'il consacre à la succession de Şîrkûh ne présume en rien de la composition des troupes : elle ne concerne que les émirs de haut rang. Selon lui, Saladin ayant des difficultés à faire reconnaître son autorité par les principaux émirs de l'armée, le faqîh Diyâ al-dîn 'Îsâ al-Hakkârî s'attacha à les convaincre les uns après les autres. À Qutb al-dîn Khasrû b. Talîl, le neveu d'Abû-l-Hîdjâ' al-Hadhabânî, seigneur (sâhib) d'Irbil, il rappela qu'il était lié à Saladin par une "surdité" commune (baynak wa baya Salâh al-dîn anna aslahu min al-Akrâd"). Cet argument, couplé à des promesses d'iqtâ'-s supplémentaires convainquit Qutb al-dîn. Cette solidarité ethnique fut-elle déterminante ? On ne saurait l'affirmer. Tout au plus Ibn al-Athîr montre-t-il qu'elle existait. Il n'est pas douteux, d'ailleurs, qu'une telle solidarité fût partagée par tous les groupes ethniques des armées musulmanes. En d'autres temps, elle avait conduit l'armée fatimide à des déchirements qui avaient fait vaciller le régime. Il est logique, au moment d'une succession décisive, qu'elle ait pu être avancée par l'un des protagonistes. Mais il faut bien garder en mémoire que l'augmentation d'iqtâ-s est également soulignée ; et qu'Ibn al-Athîr, en cet endroit du Bâhir, présente les faits de la manière la plus négative qui soit pour Saladin. Toutes ces questions ont de toute façon depuis longtemps été débattues par les historiens, pour les armées ayyoubides essentiellement qui ne nous concernent pas ici prioritairement. Il semble bien que les Kurdes y étaient moins nombreux et moins puissants que les Turcs. Il en était, sans doute, de même dans les armées zankides : une proportion assurément notable de Kurdes, mais impossible à chiffrer ; une domination turque, néanmoins." 





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Armées et combats en Syrie de 491/1098 à 569/1174: Analyse comparée des chroniques médiévales latines et arabes

lundi, juillet 16, 2012

Les Kurdes dans l'armée de Shayzar

Auteur de mémoires célébrissimes popularisées par André Miquel, et dont de larges extraits mettant en scène les Kurdes ont été publiés sur ce blog entre novembre 2008 et janvier 2009, Usâma ibn Munqidh fournit des informations qui, bien qu'imprécises, ont donné l'idée à David Nicolle de "retrouver la composition ethnique de l'armée de Shayzar". Abbès Zouache reproduit les estimations dans son ouvrage. La présence de "Kurdes chrétiens", que l'on différencie "malaisément" des Kurdes musulmans est intéressante  et suggère que les groupes appelés "kurdes" au Moyen-Âge, connaissaient déjà une diversité religieuse qui s'est perpétrée :


Composition ethnique de l'armée de Shayzar fin Ve/XIe - début du Vie - XIIe siècle :

Rangs
Origines
Gouverneurs, chef militaire, émirs de haut rang (Shayzar et États voisins)
Arabes : 18,4% ; Kurdes : 5,2 % ; Turcs : 73,6% et esclaves : 2,6%

Cavalerie, émirs (essentiellement de Shayzar)
Arabes : 44,4% ; Kurdes : 41, 6 % ; Kurdes chrétiens : 2,7% ; Turcs : 5,5% et esclaves 5,5%

Soldats, sans plus de précision, dont piétons volontaires (essentiellement de Shayzar)
Arabes : 50% ; Kurdes 21,4% ; Turcs : 0% et esclaves : 14,3%  (plus des « autres Nord-Africains », sans plus de précision)



"Au Vie/XIIe siècle, il y avait longtemps qu'on reconnaissait aux Kurdes des qualités de guerriers. Les géographes arabes les caractérisaient par leur dureté, leur violence, leur sens de l'honneur et de l'indépendance et leur élégance ; Usâmâ b. Munqidh les louait pour leur "fidélité sans faille" et leur "bravoure absolue". Ils servaient autant à pied qu'à cheval. Lors de leur arrivée en Syrie, les Francs furent confrontés, notamment, à des troupes kurdes. Si on suit Guibert de Nogent, ils les découvraient :
"De son côté, le prince mécréant avait levé des troupes non seulement chez les Turcs, les Sarrasins, les Arabes et les Perses, bien connus des historiens, mais dans des nations encore ignorées, chez les Pauliciens, les Kurdes, les Azymites, les Agulans, ainsi que chez d'autres peuples peu nombreux, mais d;aspect monstrueux."
Ce sentiment d'ignorance ne perdura pas. Guillaume de Tyr, par exemple, parle régulièrement des Kurdes. Il fait même le portrait de l'un d'eux, Şîrkûh.
Il est difficile de déterminer leur importance dans les armées musulmanes, les chroniqueurs ne les mentionnant, la plupart du temps, que très rapidement. Ainsi Ibn al-Athîr, qui les évoque bien dans son récit de la bataille de Harrân (1104) : "Sukmân avait sept mille cavaliers turcomans (fâris), Djkarmiş trois mille cavaliers turcs, bédouins et kurdes", mais se contente, lorsqu'il parle du butin, de nommer les "Turcomans" et les "Turcs". S'agissait-il d'auxiliaires ou de troupes régulières ? Si on sait qu'employer des Kurdes était courant, peu est dit de ceux qui, nomades, transhumaient en Djéziré où ils étaient parfois la proie des Francs. Avant de prendre Édesse, en 1144, Zankî avait été rejoint par "de nombreuses tribus kurdes". Sur le territoire syrien, les choses étaient un peu différentes, même si la présence kurde y était ancienne, du moins suffisamment pour qu'on considère que le fondateur éponyme de la dynastie des atabegs du Luristân, Fadlawî ou Fadlûya, y était établi. Ses descendants avaient migré vers le Luristân, via Mayyâfâriqîn et l'Azerbaïdjan, où ils étaient parvenus au tout début du Ve/XIe siècle. Pendant ce siècle, leur poids militaire s'accrut en Syrie. Le Krak des Chevaliers portait originellement le nom de Hisn al-Safh, "le Château de la Pente", avant de devenir le "Château des Kurdes", Hisn al-Akrâd. Les unités kurdes auxquelles il dût ce changement y auraient été installées en 422/1031 par Şibl al-dawla Nasr, prince mirdasside d'Alep.
Les Kurdes étaient nombreux dans l'armée de Shayzar (voir le tableau plus haut) comme dans celle de leurs ennemis. Usâma b. Munqidh fait état de très nombreuses individualités, tel ce Surhanak, "chef (ou soldat d'élite ?), muqaddam parmi les Kurdes", combattant intrépide mais inexpérimenté auquel un compagnon d'Usâma, Djum'a al-Numayrî, livra un véritable duel. Un passage de la Bughya d'Ibn al-'Adîm, où est racontée l'histoire d'un homme en détresse devant un tombeau vénéré, illustre également leur importance dans les armées musulmanes. Ibn al-'Adîm rapporte ici les paroles de son oncle :
"J'ai entendu dire mon oncle, Abû Ghânim Muhammad b. Hibat Allâh b. Abî Djarâda : Le Şaykh Rabî' b. Mahmûd al-Mârdînî l'ascète (al-zahîd) me raconta :
"J'étais venu visiter le tombeau de Khâlid b. al-Walîd à Homs, quand j'y vis un homme kurde multipliant les pleurs et les sanglots, élevant là-dessus la voix. Je lui dis alors :
– Qu'est-ce qui t'a rendu ainsi ?
Il répondit :
– Il m'est arrivé, avec le maître de ce tombeau, quelque chose qui a rendu nécessaire ce que tu vois.
Je l'interrogeais alors sur cette chose, et il dit :
– Les Francs, en incursion déprédatrice (mughîrîn) contre Hims, ayant surgi et ayant encerclé la ville, l'ensemble des portes fut fermé, si ce n'est une seule. Je me rendis alors à ce tombeau, et dis : "Souffle-moi son courage en cette heure". Puis je sortis sans craindre personne : les Francs n'avaient plus, à mes yeux, de puissance (miqdâr) en rien. Je les chargeais alors, tuai deux cavaliers (fâris), en capturai deux, m'en saisis avec leurs chevaux. Je me rendis ensuite avec eux auprès d'al-Malik al-'Âdil Nûr al-dîn Mahmûd. Voici ce qui m'a mis dans l'état où tu vois."
Comme le montre l'allusion au prince Nûr al-dîn, cet événement se déroulait sous les Zankides, en général considérés comme les souverains qui firent le plus appel aux Kurdes." 



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Armées et combats en Syrie de 491/1098 à 569/1174: Analyse comparée des chroniques médiévales latines et arabes

Libérez Sevil Sevimli



"Depuis le 9 mai 2012, Sevil Sevimli, citoyenne française d'origine turque, étudiante Erasmus, partie étudier dans la région d'origine de ses parents, s'est fait arrêter en Turquie pour avoir acheté quelques livres, être allée à un concert (groupe "Grup Yorum") et avoir participé aux manifestations du 1er mai. Aucune loi en Turquie n'interdit de tels actes... Quelles que soient vos origines ou vos idées, si vous êtes attachés à la démocratie et si vous êtes révoltés par l'idée même qu'une jeune étudiante de 19 ans partie étudier dans son pays d'origine puisse se faire emprisonner, accuser de terrorisme sans aucune preuve et sans qu'il soit possible à sa famille et à son comité de soutien d'avoir accès à son dossier, nous vous invitons à signer et à diffuser cette pétition. Nous devons montrer à Sevil qu'elle n'est pas seule et manifester notre désapprobation de la dérive autoritaire du pouvoir en Turquie."

samedi, juillet 14, 2012

Armées seldjouqides et fatimides

"Dans un bel survol de l'évolution des armées égyptiennes jusqu'à Saladin, Maqrîzî se plaît à souligner que l'armée de ce dernier se restreignait aux Turcs et aux Kurdes. Il avait mis fin à une organisation que le chroniqueur semble dénoncer comme trop bigarrée et inefficace : un djund ("armée", ici) d'esclaves noirs ('abîd), d'émirs égyptiens, de bédouins ('urbân), d'Arméniens, etc. Alors la diversité ethnique n'apparaissait-elle plus comme une force, mais au contraire comme une faiblesse.
De fait, l'un des critères les plus souvent utilisés par les auteurs arabes est pour caractériser les armées musulmanes est l'appartenance ethnique, comme si rien d'autre ne les structurait. Les chroniqueurs latins n'agissent pas différemment. Si ce n'est quelques affabulations (les Pauliciens de l"Anonyme, les Azymites de Guibert de Nogent, etc.) et leur utilisation ponctuelle du terme "Sarrasin", il faut souligner qu'ils font presque constamment référence aux Turcs. Aux Turcs, identifiés comme les ennemis les plus menaçants, et (mais à un moindre degré) aux Arabes, ainsi que, accessoirement, aux Kurdes et aux "Persans" – sans qu'on sache forcément à quel peuple ce dernier terme renvoyait. À rebours de cette profusion de peuples et de ces étalages frisant parfois l'extraordinaire, les auteurs arabes font preuve, au contraire, d'une extrême sobriété lorsqu'ils désignent l'envahisseur et ses héritiers."

*

"Cette année-là : Sandjar se présenta à al-Rayy et s'en rendit maître. Puis eut lieu une bataille terrible (waq'a 'azîmâ) entre lui et son neveu Mahmud b. Muhammas Şâh dans le désert de Sâwa. Cinq rois accompagnaient Sandjar, sur cinq trônes – dont le roi (malik) de Ğazna, qui avait quarante éléphants, montés par des combattants – ainsi que des milliers de Bâtiniens et des milliers d'infidèles. D'ailleurs, on dit qu'il était à la tête de cent mille [hommes], et que Mahmud avait trente mille [hommes]".
Si cela n'apparaît pas dans ces quelques lignes, le cœur de ces armées était tout de même turc – qu'il s'agisse de mamelouks ou de Turcomans. Turcs, Arabes et Kurdes : trois des groupes ethniques sur lesquels les sources latines insistent lorsqu'elles traitent des interventions seldjouqides en Syrie. À parcourir les chroniques arabes, c'est apparemment parmi ces trois ethnies que les sultans seldjouqides et les grands émirs qui les servaient ou les combattaient puisaient avant tout. Par exemple, les forces à la tête desquelles Sayf al-dawla Sadaqa al-Asadî fut battu et tué, en 1108, ne se limitaient pas exclusivement, contrairement à ce que sa proclamation avant sa mort laisse entendre ("Je suis Tâdj al-mulûk, je suis le roi des Arabes"), aux Arabes bédouins (effectivement les plus nombreux) : un corps de Kurdes (djamâ'a min al-Akrâd ; al-Akrâd) participa à sa défaite. Et si Ibn al-Athîr se plaît à opposer les "Turcs" à ses hommes, cela ne signifie évidemment pas qu'il n'en employait pas."

*

"Ces armées orientales n'étaient pas aussi homogènes. Ibn al-Qalânisî révèle par exemple qu'en 1112 Mawdûd avait réuni une armée hétéroclite de Turcs, de Kurdes et de "tous ceux qu'il put rassembler". 


Abbès Zouache :  Armées et combats en Syrie (491/1098-569/1174). Analyse comparée des chroniques  médiévales latines et arabes (IFPO, Damas, 2008).  

Joseph Saladin, Capitaine de Nouredin ou Les Mammlus du Curdistan

Stewart Museum

Carte de l'Afrique commandée par Louis XV, gravée par Nolin :
"Empire des Mammlus 
Les Mammlus originaires de la Circassie, d'autres disent du Curdistan, n'ont commencé à se faire connaître que pendant les Croisades. Joseph ben Aioud (sic) Chadi Saladin Capitaine de Nouredin Zenghi souverain d'Alep et de Damas appellé contre les Chrétiens par Adhad Calife d'Égypte le déposséda l'an 1171 et établit la monarchie des Mammlus après la mort du Calife. Ses successeurs prirent le nom de Soudan."


Visible à Saint-Malo, Chapelle Saint-Sauveur, jusqu'au 30 septembre, dans l'exposition




jeudi, juillet 12, 2012

Les Roms de Duhok et de Mossoul




Magnifique prestation au kemençe et en voix d'un Rom de Duhok

Très intéressant reportage sur les Roms du Behdinan, très nombreux maintenant à Duhok, (ils sont appelés Domari par les Kurdes mais je ne sais le nom qu'ils se donnent eux-même), au point qu'ils ont fondé un centre culturel et réclament aussi un siège de député afin d'être reconnu comme minorité, comme le mentionnait un reportage initialement publié par niqash.org).


Le reportage complet peut être vu sur YouTube en plusieurs parties :

- Partie 1 : Fête de circoncision.
- Partie 2 : Danse et kemençe.

- Partie 4 : Entretien avec ces Roms de Mossoul ou de Duhok, dont il est indiqué qu'en plus du kurde et du goranî, ils ont leur langue 'proche de l'hindi)


Les Kurdes, archers des Francs

"Un extrait du Kitāb al-I‘tibār d’Usāma b. Munqiḏ laisse entendre que des Kurdes étaient employés comme archers, dans les garnisons des places fortes franques. En 1121, une expédition commune – Munqiḏites et troupes de Hama – fut décidée contre Apamée. Usāma et Šihāb al-dīn Maḥmūd b. Qarāǧa la dirigeaient. Certainement informés de leur arrivée, les Francs – cavaliers et fantassins – les attendirent au devant de la place, sur un terrain difficile, parsemé de ruines, où les chevaux avaient du mal à avancer. Les Francs ayant tenu bon, les musulmans prirent la décision de les contourner et de monter vers la porte de la forteresse (bāb al-hisn). Les Francs firent alors marche arrière. Sous Apamée, où Usâma parvint avec l'un de ses serviteurs, ils reçurent une pluie de pierres et de flèches. À l'écart, "par peur des Kurdes", 'alâ khawf al -Akrād, archers et frondeurs donc, Šihāb al-dīn n'osait pas avancer. Finalement, une flèche l'atteignit, sans doute empoisonnée, et le tua. Hommes de garnison, ces Kurdes ne faisaient rien d'autre qu'à Šayzar ou à Hama, où ils formaient une part non négligeable des troupes."
Abbès Zouache pour  Armées et combats en Syrie (491/1098-569/1174). Analyse comparée des chroniques  médiévales latines et arabes (IFPO, Damas, 2008). 

mercredi, juillet 11, 2012

Les enfants de Belleville





Sortie mercredi 11 juillet des Enfants de Belleville, d'Asghar Farhadi, avec Taraneh Alidoosti, Hossein Farzizadeh, Babak Ansari, Faramaz Gharibian.

Synopsis : Akbar est jeune, il vient d’avoir 18 ans, mais Akbar est condamné à mort. Alors qu’il attend son exécution dans une prison de Téhéran, son meilleur ami et sa sœur vont tenter d’obtenir le pardon du père de sa victime, seul moyen pour lui d’échapper à son destin.


mardi, juillet 10, 2012

Les juifs d'Iran à travers leurs musiciens

Mercredi 11 juillet à 22 h 00 sur Judaïques FM : Alain Chaoulli pour Les juifs d'Iran à travers leurs musiciens (L'Harmattan) ; De l'art et de la vie, F. Szapiro.




Présentation de l'éditeur :
En Iran les Juifs ont eu un destin particulier, une longue histoire, qui dure depuis plus de 2700 ans dans ce pays. Ils ont traversé des périodes difficiles et ont souffert des persécutions. Les difficultés rencontrées par les Juifs seront longues à disparaître. Il faudra attendre le concours des responsables venus d'Europe et l'ouverture des écoles de l'Alliance israélite universelle en 1898 pour que les persécutions s'amenuisent lentement. Malgré tout, les Juifs auront vécu des moments d'angoisse et d'inquiétude et leur destin aurait pu changer avec la Deuxième Guerre mondiale et la menace du nazisme. Heureusement pour eux, l'armée allemande n'est pas arrivée en Iran. 
La création de l'Etat d'Israël avait provoqué une violente réaction d'hostilité dans le monde arabe. Mais, en revanche, l'Etat iranien et le jeune Etat hébreu avaient scellé une alliance militaire et politico-économique après sa proclamation en 1948. Et à partir des années 1960, les relations qu'avait mises en place Mohammad Rezâ Shâh avec l'Occident amèneront un dynamisme économique en Iran. La Révolution islamique de 1979 provoque une rupture totale avec la politique pratiquée précédemment. L'Iran islamique rompt brutalement tout contact avec "l'Etat sioniste" et ne lui accorde aucune légitimité politique. Le plus important à retenir néanmoins : il semble qu'en Iran, les Juifs se sentent avant tout iraniens et affirment leur attachement à la culture iranienne. Ils sont des Iraniens et l'Iran est leur patrie. Mais ils savent qu'ils vivent dans un pays musulman, qu'ils sont reconnus officiellement comme les autres minorités par la Constitution iranienne depuis 1906, qu'ils peuvent pratiquer leur culte librement, mais ils ne doivent pas transgresser les règles qui leur sont imposées. Ils sont iraniens et obéissent aux lois du pays. 
Tout cela amène à constater l'existence en Iran de la plus forte communauté juive du Moyen-Orient. Les Juifs iraniens ont aimé et joué la même musique que les autres Iraniens et avec le même plaisir. Ils se sont approprié les modes de la musique persane dans leurs chants religieux. 
Les documents écrits sur l'histoire des Juifs d'Iran ne sont pas nombreux. On connaît peu leur communauté et leurs conditions de vie au quotidien. Cette recherche a tenté d'apporter quelques indices sur ce monde méconnu. 
Biographie de l'auteur Alain Chaoulli est l'un des principaux spécialistes de la culture juive en monde iranien. Il est titulaire d'un diplôme de l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales et d'un diplôme de docteur de l'Université de la Sorbonne nouvelle. Il est l'auteur de plusieurs publications sur l'histoire des Juifs en Iran, dont La Deuxième Guerre mondiale et la communauté juive en Iran face au nazisme, Les traditions musicales juives, Les tapis persans et les Juifs et Les musiciens juifs en Iran aux XIXe et XXe siècles (L'Harmattan).

  • Broché: 370 pages
  • Editeur : L'Harmattan (16 avril 2012)
  • Collection : L'Iran en transition
  • Langue : Français
  • ISBN-10: 2296966373
  • ISBN-13: 978-2296966376

samedi, juillet 07, 2012

Le retour de la vengeance de l'âne IV




Si vous avez raté le début :

Saison 1 : L'origine de la question asine au Kurdistan

Saison 2 : Le retour du roi au Gondor de l'Âne à Suleymanieh

Saison 3 Les ânes à deux pattes contre-attaquent

Saison 4 : 

Ce soir, à Suleymanieh, ne pas manquer la seconde inauguration du leader politique le plus sympathique et le plus avisé du Kurdistan et – sûrement pour toutes ces raisons – le plus haï. 

Le leader du Parti de l'Âne dominera à nouveau, du parc Azadî, la ville de Sulaymanieh de son auguste effigie, laquelle fut vandalisée à la fin du mois d'avril, à peine 10 jours après sa première inauguration. Omar Khol, secrétaire du Parti de l'Âne vous convie tous à la fête, tandis que les esprits chagrins et les pisse-froid sont priés de rester dans leur propre étable.

jeudi, juillet 05, 2012

La vérité de l'islam

Vendredi 6 juillet à 15 h 00 : La vérité de l'islam, avec Michel Orcel, auteur de La Dignité de l'islam. Réfutation de quelques thèses de la nouvelle islamophobie chrétienne (Bayard) et L'Invention de l'islam. Enquête historique sur les origines (Perrin). Également auteur du Messager, de Le Tasse (Verdier). Cultures d'Islam, A. Meddeb.



Présentation de l'éditeur 
"C'est à la faveur de recherches sur l'état de l'islamologie contemporaine que l'auteur de ces lignes a découvert avec effroi qu'une bonne part de ce qu'on nomme aujourd'hui l'islamophobie savante est intimement liée à l'Eglise".

  • Broché: 187 pages Editeur : Bayard Jeunesse (8 septembre 2011) Collection : ETUDES ET ESSAI
  • Langue : Français ISBN-10: 2227482214 ISBN-13: 978-2227482210


Présentation de l'éditeur : L'islam n'a pas été fabriqué pour des raisons politiques par les habiles califes omeyyades, comme le suggère une certaine islamophobie savante. Mais comment est-il né ? Si la Tradition musulmane répond à cette question par un récit circonstancié, pour nombre de chercheurs occidentaux la genèse du dernier monothéisme n'est pas moins obscure que celle du christianisme ou du judaïsme. Relisant l'histoire à travers des documents peu connus - sources non musulmanes, récits mineurs ou hétérodoxes -, n'hésitant pas à confronter la Tradition à la science laïque et aux découvertes les plus récentes, Michel Orcel s'est lancé dans une enquête passionnante sur les cinq grandes énigmes historiques qui entourent la genèse de l'islam (622-692). Son travail jette un éclairage nouveau sur l'existence et le rôle du Prophète ; sur la constitution du texte coranique ; sur les origines de La Mecque, ignorée des anciens géographes, et de la Kaaba païenne ; enfin, sur le Dôme du Rocher, mystérieux sanctuaire qui, presque interdit d'accès par le pouvoir hébreu, continue à rayonner sur la ville la plus sainte et la plus explosive du monde. Biographie de l'auteur Michel Orcel, docteur ès lettres et sciences humaines, diplômé d'islamologie, ancien maître de conférences à l'Université, est l'auteur de nombreux ouvrages (romans, essais, voyages) et traductions. Dans le domaine arabo-musulman, il a notamment donné Les Larmes du traducteur, Voyage dans l'Orient prochain, et une traduction de Sourates et fragments du Coran.

  • Broché: 224 pages Editeur : Librairie Académique Perrin (3 mai 2012) Langue : Français
  • ISBN-10: 2262033897 ISBN-13: 978-2262033897



Présentation de l'éditeur"Se pourrait-il que tout cela ne soit qu'un rêve, que tu ne sois rien d'autre qu'un produit de mon imagination, et que toutes les conversations que j'ai eues avec toi par le passé ne soient que des songes ?" C'est dans les geôles de Ferrare que Le Tasse écrivit en août 1580 Le Messager, un de ses dialogues les plus mystérieux, les plus envoûtants, les plus vifs aussi. Il porte sur ces voix qui nous traversent, nous aident et nous sollicitent dans le rêve comme dans l'existence vigile. Chacun d'entre nous a déjà rencontré ces créatures que Walter Benjamin définit comme "crépusculaires" et inachevées, semblables aux gandharva des sagas indiennes, mi-génies célestes, mi-démons. Ainsi, nous sommes peuplés : de rêves, de visions, de contemplations, d'images - de messagers. Et si nous sommes si peu certains de l'existence de ces êtres que nous recourons souvent à l'expression convenue de "fantômes", toute une tradition nous précède qui accordait à ces apparitions, à la manière dont elles s'inscrivent et agissent en nous un intérêt qui dépasse de loin l'histoire des idées. Quand Montaigne rendit visite au Tasse, "l'un des plus judicieux, ingénieux et plus formés à l'air de cette antique et pure poésie qu'autre poète Italien avait de longtemps été", il évoqua "cette clarté qui l'a aveuglé". Cette sombre clarté nous éclaire. Elle fait de la lecture du Messager un voyage parmi les figures du passé ainsi qu'une exploration parmi les ombres nul nous habitent."

Broché: 120 pages Editeur : Editions Verdier (13 avril 2012) Collection : Terra d'altri Langue : Français ISBN-10: 2864326442 ISBN-13: 978-2864326441

mardi, juillet 03, 2012

Tom Clancy part en guerre contre les Kurdes




Après Game of Thrones vs Turcité indignée, voilà que le second conflit diplomatique de la semaine oppose Ubisopft au Gouvernement Régional du Kurdistan et pas seulement lui, sur ce coup-là, tous les Kurdes, hormis ceux du PKK qui n'aiment pas ce drapeau, pourraient porter plainte pour "atteinte à la kurdicité".


Dans Rudaw, le journaliste Wladimir Van Wilgenburg nous apprend en effet que le département des Relations étrangères du Kurdistan s'est fâché contre Ubisoft, 3ème éditeur de jeux vidéo au monde et entreprise française, dont le nom, paraît-il, est l'acronyme de l'Union des Bretons Indépendants, s'il faut en croire wikipedia. Si c'est le cas, bravo les Bretons, eux qui adorent comparer leurs misères à ceux des Kurdes, des Berbères et des derniers Amérindien et tout ça…


L'éditeur de Prince of Persia, Assassin's Creed, de Lapin crétin et de Splinter Cell doit en effet sortir un nouveau volet de Splinter Cell et des aventures de Tom Clancy  pour 2013 : Splinter Cell Blacklist. Le synopsis n'a pas dû donner mal au crâne au scénariste : Un groupe de nations voyous (Rogue Nations) préparent une série d'attentats aux États-Unis et voilà :







C'est en regardant ce trailer que des Kurdes se sont étranglés car dans le bastion des terroristes s'affiche un beau drapeau du Kurdistan (très exactement à 4' 20 et 4' 21, oui j'ai fait comme la commission des Turcs outragés par GoT, j'ai vérifié ; heureusement que le trailer dure moins longtemps que la Saison de GoT parce que quel ennui…).

C'est ainsi que, soit alerté par des videogamers kurdes, soit lui-même grand amateur des aventures de Tom Clancy, le ministre des Affaires étrangères kurdes, Falah Mustafa Bakir a écrit une lettre furibarde au département de la communication d'Ubisoft (US). Son directeur, Michael Burk a promis que le drapeau serait enlevé dans la version finale, et qu'ils n'avaient jamais eu l'intention d'introduire dans les esprits une confusion possible entre le symbole du drapeau kurde et les motivations des méchants terroristes, mais alors, pas du tout. On pourrait quand même se demander quelle intention ils avaient eu en tête à l'origine. 


Mais à cela, Scott Lee, directeur artistique d'Ubisoft à Toronto, fournit l'explication qui aurait dû sauter aux yeux de tous les Kurdes, voyons :  Le graphisme des scènes s'inspire des villages actuels dans les montagnes du Kurdistan "rural". Les terroristes ont chassé les villageois et utilisent cette bourgade comme repère, car son "camouflage naturel" en fait un camp d'entraînement clandestin idéal. Pourquoi les terroristes ont gardé le drapeau kurde accroché bien en vue ? Ben justement par par souci de "camouflage", insiste Scott Lee qui explique avoir eu le souci de juxtaposer armes lourdes et éléments militaires intensifs dans un décor civil, innocent, champêtre, quoi. Tout juste si on ne fait pas enfiler aux "terroristes" şalwar et puşuk.

Mais cela n'a pas calmé les Kurdes qui ont ouvert une page de protestation sur facebook, laquelle indique qu'être la plus grande nation sans État au monde n'en fait pas forcément des terroristes. Ou alors, on pourrait croire qu'avoir été l'allié des USA dans la guerre contre l'Irak en 2003 (comme le rappelle Falah Mustafa Bakir dans sa lettre) en fait effectivement une "nation voyou".


lundi, juillet 02, 2012

"That is law." (Stannis Baratheon )

9 officiers de l'armée turque se sont fait virer pour : 

- Abus sexuel
- Violation de l'article 301 du code pénal qui condamne les 'insultes à la turcité'.

Ont-ils enfilé par le fondement des recrues sans défense ? Ont-il salué le drapeau arménien ? yok yok yok, rien de tout cela, rapporte Hürriyet… 

Ils se sont juste montrés un peu trop enthousiastes envers la série Game of Thrones, adaptation à succès de la saga A Song of Ice and Fire, de R. R. Martin, au point de la projeter aux élèves de l'Académie militaire Maltepe d'Izmir en cours de langues étrangères (on ne sait si, en plus de l'anglais, les élèves étaient censés s'initier à l'andalish, au haut valyrian, au bravos ou au dothraki). Toujours est-il qu'après avoir fait étudier la série durant dix semaines, les officiers ont été dénoncés par lettre anonyme à l'administration de l'académie, en raison des "scènes de sexe perverses et corruptrices" projetées, en plus de celles qui dépeignaient les Turcs comme une "tribu barbare avec des rituels religieux pervers". 


Exemple de rituel religieux barbare, pervers et anti-végétarien, en plus. 


Le nom de la tribu incriminée n'est pas précisé mais il n'est pas très difficile de chercher l'objet de l'outrage au-delà des mers et non par-delà le Mur…

De plus, la série encouragerait la consommation d'alcool. Là, il est difficile d'identifier un peuple  en particulier, vu qu'e rien qu'à Port-Réal, il y a concours pour vider les coupes, mais il est facile de démontrer à la police des mœurs qu'il s'agit en fait d'une dénonciation des méfaits de la boisson, si l'on a bien suivi les mésaventures du roi Robert.


"Comment ça, je bois trop ? C'est Cersei qui balance ?"


"T'inquiète, je crois que c'est moi qu'on vise."


Quoi qu'il en soit une équipe d'instructeurs s'est sentie obligée de regarder la série afin de déterminer si les mœurs sexuels des Dothrakis et le vin en tonneau de Westeros offensaient la turcité et les bonnes mœurs. Leur conclusion fut sans appel : Oui, entre le Mur, les Îles de Fer et Essos, ils boivent et baisent dans tous les sens (même la Garde de Nuit, n'est-ce pas, Jon ?)…

"Le spectacle en question peut nuire à des individus en évolution d'une façon qui sera extrêmement difficile d'amender dans le futur."

Et là, on se dit que les Kurdes ont eu chaud, quand même : Jusqu'ici, l'armée turque et les jandarma n'étaient les auteurs d'aucun viols ni actes de torture ou de barbarie dans le 'Sud-Est'. Pour un peu que les équipes pédagogiques ne soient pas intervenues, on formait des soldats auprès desquels Joffrey ferait figure de bienfaiteur de l'humanité, des troupes capables de mener une 'sale guerre au Kurdistan', tiens, un truc jamais vu dans ces confins…

Enfin, la commission a conclu que si la série ne nommait jamais expressément les Turcs cela était clairement compréhensible par les spectateurs.


Crypto-Turc aisément détectable


"La projection de ce spectacle pourrait décourager les étudiants dans leurs activités, et affaiblir leurs sentiments patriotiques."

"Nan, j'veux toujours pas me battre."


Mais le procureur militaire a rejeté ces accusations (les procureurs militaires rejettent plus volontiers les accusations d'anti-turcité quand il s'agit d'officiers turcs que quand il est question d'éditeurs ou de membres du BDP), alléguant que la série n'est interdite qu'aux moins de 13 ans, et non aux futurs héros de la patrie qui ont entre 16 et 19 ans. Malgré cela, sans doute pour étouffer l'affaire, les officiers accusés ont été envoyés dans la Garde de Nuit mutés ça et là aux quatre coins du pays.


Les bons esprits ne se décourageant pas de sitôt, une seconde lettre anonyme a accusé les mêmes officiers (plus 5 autres) d'avoir insulté leurs supérieurs (comment on dit 'connard' en dohtraki ?). Une enquête a été de nouveau lancée.

Finalement le ministre de la Défense a décidé d'annuler l'abandon des charges et les 9 propagandistes sont de nouveau poursuivis, dans le cadre de deux enquêtes distinctes. Leur avocat prétend que les étudiants ont été obligés de signer de fausses accusations, dont le meilleur élève parmi eux, Mustafa Küçük, qui s'est fait virer ensuite (apparemment il n'a pas retenu des déboires de Sansa qu'il ne faut jamais porter de faux témoignages en attendant reconnaissance et considération des autorités). 


"Franchement, plus niais que moi, j'aurais pas cru ça possible."


Concert de soutien à l'Institut kurde