mercredi, septembre 01, 2004

Le Livre des ruses

Une autre version (il y en a tant...) de la connexion entre l'histoire de Zohak et l'origine des Kurdes, trouvé dans Le Livre des ruses, un manuscrit du 13° siècle traduit par René Khawam :

"Les victimes humaines
Le Diable employa la ruse avec Baboûrassab, appelé "al-Dahhâk", "le Rieur", pour arriver à ses fins. "Al-Dahhâk", "le Rieur", était fils de 'Alwâne, fils de 'Islîq, fils de 'Oûdj, fils de 'Âd. Il fut appelé par les Non-Arabes Baboûrâssab et construisit Babylone. Sem lui avait confié un groupe de ses descendants et lui avait donné la terre de Babylone, où il resta durant quelques temps. Lorsque mourut Sem, "le Rieur" lui succéda sur le trône des fils de Sem et fortifia son autorité pour les dominer. Il devint orgueilleux et se révolta contre Dieu, employant le supplice de la croix et le meurtre pour rester au pouvoir. Il avait bâti Babylone, lui donnant le nom de Djourfâ.

Celui qui lui enseigna à crucifier les gens et à les tuer fut le Diable, par le moyen d'une ruse qu'il ourdit contre lui. En effet, il entra un jour chez lui sous l'aspect d'un cuisinier et lui dit :
- O roi, j'exerce le métier de cuisinier, apprêtant les bons plats d'une manière parfaite. Je ne connais personne parmi ton peuple qui puisse obtenir un résultat semblable.
Le roi lui confia la direction des services de sa cuisine. Avant cet événement, les gens ne mangeaient pas de viande. Le premier mets que le Diable lui prépara fut un plat fait avec des oeufs. Le roi le mangea et le trouva bon.
-Peux-tu me faire quelque chose de meilleur encore ? lui demanda-t-il.
- Oui. Je peux t'apprêter l'animal d'où viennent ces oeufs.
- Fais-le.
Le deuxième jour, le Diable tua des poules et les prépara d'une manière telle que la chair en était savoureuse. Après en avoir mangé, le roi trouva que ce plat était bon.
Le troisième jour, le Diable tua des brebis, le quatrième des boeufs, le cinquième des bêtes égorgées. En agissant ainsi, il voulait susciter chez les hommes le désir de tuer leurs semblables et de verser le sang. Ainsi, il prenait la brebis, la clouait par la gorge sur un gibet et la laissait mourir. Puis il en faisait cuire la viande et la donnait à manger au roi.
Lorsque le Diable vit que le roi n'éprouvait plus de scrupules à le voir traiter ainsi les bêtes, il lui prépara une ruse pour le pousser à tuer les gens. Il lui cuisina un mets que le roi trouva extrêmement bon. Celui-ci, pour récompenser son cuisinier, lui accorda des vêtements d'honneur, lui remit une somme d'argent en récompense et l'éleva en dignité.
Le Diable dit :
- Je voudrais baiser les deux épaules du roi.
Il en reçut la permission et déposa un baiser sur chaque épaule. A l'endroit du baiser poussèrent deux sangsues proéminentes de grandes dimensions, ayant l'aspect de deux serpents pourvus chacun d'une bouche et d'yeux. A cette vue, le roi comprit qu'il avait devant lui le Diable. Il s'éloigna précipitamment de celui-ci et demanda :
- Quelle nourriture faut-il donner à ces deux serpents, ô Maudit ?
Le Diable, se tournant vers le roi, répondit :
- De la cervelle provenant d'êtres humains.
Puis il disparut à ses regards.
"Al-Dahhâk", "le Rieur", ordonna à son vizir de lui tuer chaque jour quatre hommes corpulents et gras afin de prendre leurs cervelles et de les lui apporter pour qu'il put donner à manger à ces serpents. Il adopta cette conduite durant une longue période de temps. Le vizir mourut. Le roi nomma à sa place un homme de la descendance d'Arfakhachd, nommé Armabîl, plein de pitié et de miséricorde. Il se mit à faire venir chaque jour quatre hommes gras, ceux dont le nom était inscrit sur une liste, ordonnait d'en tuer deux, dont on prenait les cervelles et ajoutait deux cervelles de béliers, puis les apportait à "al-Dahhâk", "le Rieur", pour nourrir les serpents. Il épargnait ainsi deux hommes sur quatre, et ordonnait à ses gens de les chasser (En arabe : karada ; c'est de cette même racine que provient le mot "kurde") vers la montagne. Ils restèrent là jusqu'à ce que mourût "le Rieur". Une partie d'entre eux élut domicile dans la montagne : leurs descendants forment le groupe des Kurdes, qui existe encore de nos jours."
Le Livre des ruses : Les ruses du Diable.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Concert de soutien à l'Institut kurde