jeudi, juillet 18, 2002

Istanbul

Retour en avion normal, c'est-à-dire que j'ai sidéré le serveur du buffet à l'aéroport de Kars en lui demandant un whisky à 11 heures du mat. S'il m'avait fait le coup du petit crétin de Cizre je lui aurais défoncé le crâne. Roxane sait que je ne suis pas d'humeur très zen quand je prend l'avion. J'ai donc passé deux heures 30 cramponnée à mon siege en maudissant jusqu'à la dixieme génération tous ceux qui m'envoient dans des pays où il faut se rendre en avion. Dire qu'il y avait un temps où l'on ne voyageait qu'en bateau... Même le Titanic, je préfère...Maintenant Istanbul. Très chaud, très lourd, moite, plus pénible qu'à Cizre, finalement. Bakhtiar s'est tiré en Europe, je l'ai appris à demi-mots par sa famille. Vlad est très très maqué mais pas abattu du tout. Ça a l'air d'être un sacré nid de frelons la politique ici. Si les jeunes se tirent, ils ne vont plus durer très longtemps. Cela me rappelle tout à fait les débuts de l'hémorragie en 1999, quand le PKK a commencé de se barrer en couilles. Même symptomes : décomposition, affrontements, affolement, directives aussi menaçantes que contradictoires. D'ailleurs ce parti fait si peu peur aux Turcs à présent, que des Kurdes d'Istanbul, bien assimilés et très éloignés de la lutte, vous parlent tranquillement d'un parent, qui est en Europe, à Medya TV, et ce dans des lieux publics, un bistro sur Istiklal par exemple. Il y a une époque où on ne se l'avouait même pas entre membres d'une même famille. Aujourd'hui cela n'a rien d'un secret dangereux, c'est comme si on parlait de l'original de la famille, d'un exotisme charmant... Il est vrai qu'on a peu d'exemple historique d'un parti qui se soit vendu à ce point, en baissant autant les enchères. L'idéologie tombe d'elle-même, ne laissant aucun souvenir. Les cadres ? Ils rentrent dans la vie civile, ils font des affaires (du moins pour les plus doués ou les plus mafieux), la plupart végètent. En tant qu'anciens combattants, ils ont d'ailleurs peu de faits glorieux à raconter à la postérité. Quelque chose entre "Comment nous avons été trahis" et "Comment nous avons trahi".

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