mercredi, mars 29, 2000

Kharpout-Elazig

A Kharpout, au musée. Objets de bronze, petits bassins, une sorte de seau. Motifs récurrents : 2 médaillons, l'un à noeuds, l'autre à volutes. Plus un de cyprès aux palmettes, très stylisé.

Grande Mosquée : cour centrale, bassin, nef, 2 rangées d'arcades.

Arcs persans en brique rouge. Les minarets sont en brique, motifs. Celui de la Grande Mosquée est penché.

A Diyarbakir, j'ai rencontré un majnoun. L'était-il avant ? C'était dans un restaurant. A la table d'à côté, un homme élégamment vêtu, chevalière et montre en or, dînait seul. Pas un regard. Une vraie tête de Kurde, nez d'aigle et moustache. Déjà le serveur me demande : "Kurdi zanî ?"Ce qui nous a fait rire. Peut-être était-on un peu repéré ? Je n'ai pas bronché. Le repas était commencé quand le serveur apporte des fistik en nous expliquant que c'est un cadeau du monsieur à côté. Celui-ci, impassible, regardait droit devant lui, comme s'il ne nous voyait pas. Puis un peu plus tard, la même chose avec des cigarettes. Je n'ai croisé qu'une fois son regard et je lui ai souri. Le personnel lui témoignait une déférence naturelle. Il était visiblement aimé et respecté. Puis il nous a fait apporter une demi-bouteille du vin que nous avions bu. Le fou-rire nous gagnait tout de même. A la fin du repas, il a fait demander par le serveur si nous acceptions de venir à sa table. Au point où on en était... Il avait été rejoint entre-temps par un autre homme, plus jeune, qui a tout de suite compris que je parlais le kurde. La conversation s'est engagée et l'homme, qui s'appelait Hassan, commence à nous expliquer que nous étions ses invités. Et tout à coup à la fin du discours, il conclut en me regardant d'un air émerveillé, "Ez ji te hez dikim." J'étais si saisie que j'ai mis un certain temps à réaliser que c'était une déclaration en bonne et due forme. D'amour, de passion. Que je sois mariée ou non il s'en foutait absolument. Je pouvais tout lâcher pour lui si je voulais. N'étais-je pas libre ? Sa formule était simple : je suis venue, je me assise non loin de lui et je suis rentrée dans son coeur. Voilà. Et il m'aime. Combien de fois a-t-il répété ça, en extase. Il voulait que l'on vienne avec lui, il voulait que nous allions quelque part écouter de la musique, il voulait tout ce que je voulais, voilà. A chaque fois qu'il me regardait en déclarant : "tu t'es assise, tu es entrée dans mon coeur", je levais les mains au ciel d'un air fataliste. Je n'oublierai pas de sitôt ce regard, heureux, émerveillé, illuminé. Golgun, c'est ainsi qu'il m'appelle. C'est sans doute un type très bien, un grand seigneur. Il m'a raccompagné jusqu'à l'hôtel, en demandant à plusieurs reprises si je ne voulais pas m'asseoir dans un endroit et écouter de la musique. Mais il ne se fâchait pas de mon refus. Il m'a laissé son nom, 5 numéros de téléphone, tout heureux et rougissant que je lui fasse la bise. Comme Roxane toussait, il a cru que l'hôtel n'était pas assez chauffé et il a demandé à la réception d'arranger ça. Total, nous avons eu chaud toute la nuit. Il nous a semblé aussi qu'il avait réglé une nuit pour nous, celle qu'il aurait aimé passer avec moi.

Durant le repas, le guide véreux qui nous accompagnait est venu pour s'éclipser et a été rembarré, humilié par Hassan. Il est alors rentré dans une rage que seuls les gens vifs éprouvent à l'égard des gens très bien. Hassan n'a même pas élevé la voix. Qu'a-t-il dit ? Il s'est seulement indigné de ce que le guide nous adresse la parole et ne nous respecte pas. Naturellement indigné devant ce qui est vil. Il me l'a dit d'ailleurs : "Ev kes ne bash in."

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Concert de soutien à l'Institut kurde